La Cour des comptes a publié le 9 décembre un rapport portant sur l'évaluation des politiques publiques de prévention, de détection et de sanction de la corruption. Le rapport examine le cadre juridique, l'organisation des acteurs, les moyens disponibles, les résultats constatés et présente des propositions d'évolution de la gouvernance.
Contexte et évolution du cadre juridique
La loi dite Sapin II, adoptée en 2016, a instauré des obligations pour les acteurs publics et privés, notamment des dispositifs d'alerte interne et des cartographies des risques, sous le contrôle de l'Agence française anticorruption (Afa). La Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) a été créée en 2013. La Cour relève que le cadre juridique a été modifié à plusieurs reprises depuis 2013, en réaction à des événements nationaux et internationaux.
Organisation des acteurs et gouvernance
Le rapport identifie une multiplicité d'acteurs engagés dans la prévention, la détection et la sanction des atteintes à la probité. L'Afa est présentée comme acteur central de prévention et de détection, mais son fonctionnement est limité par des contraintes de moyens et par des chevauchements avec d'autres autorités, notamment la HATVP, qui dispose d'un degré d'autonomie différent. La Cour juge la configuration actuelle complexe et peu lisible pour les usagers et opérateurs.
Constats chiffrés
Le rapport mentionne des indicateurs d'activité et d'impact : les signalements reçus par l'Afa pour des soupçons d'atteintes à la probité ont presque doublé en 2024 selon le rapport annuel de l'agence. En 2022, 191 000 personnes ont été confrontées à une situation de corruption dans le milieu professionnel, selon les éléments cités par la Cour. Les services de police et de gendarmerie ont constaté 934 infractions pour atteintes à la probité en 2024, soit une hausse de 8,2 % par rapport à 2023. Les tribunaux ont prononcé 324 sanctions relatives à ces infractions en 2022.
Limites identifiées
La Cour relève des lacunes dans la prévention et la détection, en particulier dans le secteur public, où les dispositifs obligatoires sont jugés incomplets. Elle note un manque chronique de moyens humains et financiers pour certains acteurs, une faiblesse de l'impulsion politique au niveau ministériel et une capacité limitée à traduire les constatations en sanctions pénales effectives.
Scénarios de réorganisation et mesures annoncées
Pour renforcer la montée en puissance de l'action publique anticorruption, la Cour propose trois scénarios : fusionner l'Afa et la HATVP au sein d'une haute autorité anticorruption ; transformer l'Afa en autorité administrative indépendante ; ou créer un comité interministériel dont le secrétariat général serait confié au directeur de l'Afa. Le rapport indique également que le gouvernement a adopté, le 14 novembre, un plan de lutte contre la corruption pour la période 2025-2029 prévoyant la création d'un comité interministériel coordonné par l'Afa, ainsi qu'un ensemble de mesures visant le renforcement des dispositifs de formation et de prévention.
Recommandations opérationnelles
Parmi les recommandations figurent le déploiement de référents déontologues et l'extension des dispositifs d'alerte interne obligatoires dans le secteur public, le renforcement de la professionnalisation du traitement pénal des atteintes à la probité et une consolidation du rôle de l'Afa comme cheffe de file de l'action publique anticorruption. La Cour souligne que l'efficacité des dispositifs dépendra de l'engagement gouvernemental et des ressources affectées.
Observations finales
Le rapport présente un état des lieux des dispositifs et des pratiques, met en évidence des points de tension liés à la coordination et aux moyens, et formule des scénarios et recommandations visant à clarifier la gouvernance et à renforcer les outils de prévention, de détection et de sanction des atteintes à la probité.








