Faits
Le 19 décembre 2022, deux jumelles âgées de trois mois, prénommées Ambre et Emma, ont été retrouvées mortes à leur domicile à Lamarque (Gironde). La mère, Jennifer Bertrand, a déclaré en audience avoir posé les doudous des nourrissons sur leur visage puis avoir appuyé avec sa main « une minute environ » pour les « calmer ». Les nourrissons sont décédés des suites d’un étouffement.
Contexte médical
Après son accouchement, la mère a été hospitalisée pendant deux mois dans une unité psychiatrique spécialisée mère-enfant. Au moment des faits, elle était suivie en hôpital de jour et sous traitement médicamenteux. Elle a décrit la période postnatale comme une « descente aux enfers » et a rapporté des idées dépressives. Selon les éléments présentés au procès, elle s’était renseignée sur l’adoption ou le placement des enfants et les traitements suivis ont été qualifiés d’infructueux par certain·e·s intervenant·e·s.
Procès et positions des parties
Lors du procès, les expertises psychiatriques et le ministère public ont demandé aux jurés d’écarter l’abolition du discernement et de retenir l’altération du discernement, estimant que la mère était accaparée par ses souffrances personnelles, épuisée et incapable de supporter les pleurs des enfants. L’avocat général Martin Viver-Darviot a qualifié le geste de « geste fort » et « déterminé », le distinguant d’un simple geste d’apaisement.
La défense, représentée notamment par Me Stéphane Guitard et Me Béatrice Ceccaldi, a plaidé la reconnaissance de l’abolition du discernement, invoquant un isolement familial et une décompensation psychiatrique empêchant la préservation de la notion du temps et de la capacité de raisonnement. L’avocat de la famille des enfants, Me Charles Dufranc, a également pris la parole pendant l’audience et a commenté la qualification retenue.
Plusieurs interventions en audience ont mis en avant un diagnostic de dépression post-partum sévère et des critiques sur la prise en charge thérapeutique antérieure.
Décision de la cour et peine
En novembre 2025, la cour d’assises de la Gironde a condamné Jennifer Bertrand à 18 années de réclusion criminelle. La peine est assortie d’une mesure de suivi socio-judiciaire de sept ans incluant une obligation de soins. La cour a prévu une peine complémentaire de quatre ans d’emprisonnement en cas de non-respect de ces obligations. Les jurés ont délibéré environ quatre heures avant de rendre leur décision.
La cour a retenu l’altération du discernement au moment des faits, qualification retenue par la juridiction et qui a influencé la détermination de la peine.
Observations procédurales
Pendant l’audience, des observations divergentes ont été exprimées sur l’appréciation juridique et médicale du dossier, notamment sur la prise en compte de la dépression post-partum et sur l’efficience des soins antérieurs. L’avocate de la défense a indiqué ne pas savoir encore si Mme Bertrand ferait appel. À l’énoncé du verdict, la prévenue n’a pas réagi et une déclaration rapportée en audience a exprimé son attachement aux enfants en ces termes : « Depuis que les deux personnes les plus importantes au monde pour moi sont parties, ma vie s’est arrêtée. Je les aime plus que tout. »








