Ouverture d’une enquête judiciaire
Le parquet d’Ajaccio a ouvert une enquête concernant l’abattoir public multi-espèces de Porto-Vecchio (Corse-du-Sud) à la suite d’une plainte déposée par l’association L214 pour « sévices graves et mauvais traitements ». L’enquête est confiée à la gendarmerie de Porto-Vecchio. Selon les déclarations du procureur Nicolas Septe, les investigations portent sur « des manquements supposés aux règles de l’abattage et des non-conformités aux règles d’étourdissement des animaux ».
Diffusion de vidéos et dénonciation de pratiques
L214 a publié des vidéos tournées dans cet abattoir les 7 mai et 7 juillet 2025. L’association y pointe des "dysfonctionnements graves" lors de l’abattage des bovins et ovins, décrivant des animaux « saignés encore conscients après des étourdissements ratés » ainsi que des « mouvements de cisaillement lors de la saignée à vif » lors d’abattages rituels.
Selon L214, la viande issue de cet abattoir est distribuée sur l’ensemble de la Corse, notamment en supermarchés, chez les éleveurs et chez les artisans-bouchers.
Accusations portées contre les services de l’État
L214 affirme que son enquête a mis au jour « la complicité » de la Direction départementale de la protection des populations (DDPP) de Corse-du-Sud et d’autres services de l’État dans la persistance de pratiques illégales et d’installations non conformes à la réglementation. À cet effet, l’association a demandé à la préfecture la fermeture immédiate de l’établissement.
Dans une vidéo rendue publique, L214 montre une personne présentée comme vétérinaire-inspectrice référant à un employé qu’une commande à honorer n’est « pas conforme à la réglementation ».
Réactions de la préfecture de Corse-du-Sud
La préfecture de Corse-du-Sud, par voie de communiqué, réfute l’accusation selon laquelle les propos de la fonctionnaire seraient présentés avec exactitude, qualifiant d’« interprétation trompeuse » le montage vidéo de L214. La préfecture affirme que lors des inspections mentionnées par l’association, « les procédures de contrôle ont été respectées » et précise qu’aucun signalement particulier n’a justifié jusque-là une fermeture immédiate de l’abattoir.
Toutefois, la préfecture annonce l’engagement « d’investigations approfondies » après constatation de non-conformités figurant dans les vidéos de L214 mais non relevées lors des inspections officielles.
Suite donnée par L214
En réponse à la communication préfectorale, L214 signale l’engagement d’un recours en responsabilité contre l’État devant le tribunal administratif de Bastia, pour manquement à la mission de contrôle vétérinaire à l’abattoir. L’association précise avoir déjà obtenu cinq condamnations de l’État dans des affaires similaires et appelle à un rassemblement pacifique devant la préfecture.
Contexte et éléments connexes
L’abattoir de Porto-Vecchio appartient à la Collectivité de Corse et est géré par le Syndicat mixte de l’abattage en Corse (Smac).
En mars 2025, L214 avait déjà déposé plainte contre un abattoir à Charlieu (Loire), ce qui portait à trois le nombre d’abattoirs de la région Auvergne-Rhône-Alpes visés par des enquêtes de cette association, avec suspension de l’activité pour les deux premiers.
À la suite des révélations de L214, plusieurs organisations de défense animale, dont les fondations 30 Millions d’amis et Brigitte Bardot, ont sollicité la ministre de l’Agriculture pour qu’une inspection généralisée sur la protection animale dans les abattoirs soit menée.