Contexte
Face aux vagues de chaleur plus fréquentes et intenses, des architectes réévaluent des dispositifs vernaculaires pour améliorer le confort d’été sans recourir systématiquement à la climatisation. Pergolas, patios, loggias, treilles ou carbets constituent des solutions passives de protection solaire et de ventilation qui suscitent un intérêt renouvelé.
Dispositifs vernaculaires étudiés
Selon Cristiana Mazzoni, architecte-urbaniste et professeure à l’École nationale supérieure d’architecture de Paris-Belleville (ENSAPB), de nombreux exemples le long des anciennes routes d’échanges illustrent ces approches, en particulier les maisons à cour, patio ou loggia. Dans une cour intérieure, l’ombre, la végétation et parfois la présence d’une fontaine ou d’un puits contribuent au rafraîchissement. Située dans l’épaisseur du bâti, la cour limite l’ensoleillement direct des parois et favorise des gradients thermiques plus stables.
Ces organisations spatiales se retrouvent dans les riads marocains, les domus romaines, certains palais vénitiens et des demeures ottomanes à hall central. Plus à l’est, les tours à vent, fréquentes en Iran, exploitent la ventilation naturelle pour rafraîchir les intérieurs. Les constructions en terre, grâce à leur inertie et à leurs propriétés isolantes, constituent également des sources d’inspiration actuelles. Dans le sud de la France, la maison provençale illustre une implantation et des dispositifs (dont la treille au sud) destinés à se protéger du soleil et des vents dominants.
Réinterprétations contemporaines
Des réalisations récentes ou plus anciennes intègrent ces principes. À Paris, rue de Meaux, Renzo Piano a conçu en 1991 un ensemble de logements sociaux organisé autour d’une vaste cour intérieure plantée. Des habitants indiquent y ressentir des températures plus modérées par rapport à la rue et à des immeubles anciens voisins.
Toujours à Paris, la halle Pajol, réhabilitée en 2014 par Françoise-Hélène Jourda, combine récupération d’eau de pluie, panneaux solaires et un puits canadien (ou provençal) utilisant la température du sol pour alimenter une ventilation à air tempéré selon les saisons.
Cadre conceptuel et limites
Cristiana Mazzoni souligne la nécessité d’éviter une dépendance exclusive aux solutions hypertechnologiques et annonce l’organisation d’un colloque en septembre dédié aux exemples d’architecture vernaculaire. Jacques Boulnois, architecte et enseignant, rappelle que l’architecture traditionnelle mobilisait les matériaux disponibles en fonction des climats et des usages, et plaide pour un « renouvellement de pensée » afin d’élaborer une architecture contemporaine adaptée aux contraintes actuelles.
Ces références ne constituent pas une solution unique. Leur transposition nécessite une adaptation fine aux contextes locaux. Par exemple, pour les tours à vent iraniennes, la ventilation naturelle dépend de phénomènes aérologiques spécifiques, difficiles à maîtriser et variables selon les sites. L’enjeu consiste à actualiser ces savoirs en les combinant, lorsque pertinent, avec des technologies contemporaines et une conception bioclimatique contextualisée.