Objet de la plainte
Une plainte visant la Banque de France pour complicité de génocide et de crimes contre l'humanité a été déposée le 4 décembre 2025 auprès du doyen des juges d'instruction du pôle crimes contre l'humanité du tribunal judiciaire de Paris. Les parties civiles sont le Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR) et ses fondateurs Alain et Dafroza Gauthier. La plainte cherche à établir si la Banque de France a manqué à ses obligations de contrôle pendant la période du génocide au Rwanda.
Contexte historique
Le génocide au Rwanda a entraîné la mort de plus de 800 000 personnes, principalement des Tutsi, entre avril et juillet 1994, selon l'ONU. Le Conseil de sécurité des Nations unies a imposé un embargo sur les ventes d'armes au Rwanda le 17 mai 1994.
Allégations formulées
Selon la plainte, sept virements ont été effectués depuis le compte de la Banque nationale du Rwanda logé à la Banque de France entre le 5 mai et le 17 juillet 1994, pour un montant total d'environ 3,17 millions de francs. Ces opérations auraient été réalisées alors que le génocide était en cours et après l'adoption de l'embargo onusien.
Un premier versement daté du 5 mai 1994, pour un montant de 435 000 francs, est indiqué au bénéfice d'une entreprise française, Alcatel, et est décrit comme destiné à l'achat d'équipements de communication satellitaire. D'autres virements sont mentionnés comme ayant été adressés à des ambassades rwandaises en Égypte, en Éthiopie et en Afrique du Sud; les parties civiles affirment que certaines de ces ambassades ont servi à l'achat d'armement.
L'enquête internationale et des analyses évoquées dans la plainte indiquent que des dirigeants rwandais de l'époque auraient centralisé des avoirs étrangers sur le compte de la Banque nationale du Rwanda à Paris. Ces éléments sont présentés par les plaignants comme susceptibles d'avoir permis la poursuite de transferts malgré le contexte de violence et l'embargo.
Positions des parties
Les plaignants et leurs avocats soutiennent que la Banque de France n'a pas gelé le compte concerné et qu'elle a autorisé des transferts alors que d'autres établissements européens auraient refusé de les réaliser. Ils allèguent que ces opérations ont contribué à des achats liés à l'appui logistique ou à l'armement des forces responsables des massacres.
La Banque de France a indiqué avoir procédé à des recherches sommaires depuis le dépôt de la plainte et déclaré ne pas avoir trouvé de traces de ces opérations dans ses archives consultées à ce stade. L'institution a expliqué que certaines pièces et éléments comptables sont détruits après un délai réglementaire de dix ans et a précisé que des investigations internes se poursuivent.
Travaux d'enquête et antécédents judiciaires
La plainte s'appuie, selon ses auteurs, sur des analyses d'enquêtrices et de chercheurs spécialisés dans les circuits de financement et le trafic d'armes au moment du génocide. Des procédures judiciaires distinctes portant sur des transferts financiers et des allégations de soutien à l'armement au profit de milices hutu ont été engagées antérieurement; à titre d'exemple, une enquête judiciaire concernant le groupe BNP Paribas pour des faits similaires est en cours depuis 2017.
Situation actuelle
La plainte déposée auprès du pôle crimes contre l'humanité a été enregistrée et donne lieu à des investigations judiciaires. Les positions exprimées par les parties civiles et par la Banque de France figurent dans l'acte et dans les réponses initiales de l'institution; l'instruction et les vérifications complémentaires restent en cours.








