Contexte et annonce
Reporters sans frontières (RSF) a annoncé qu'elle allait saisir l'Arcom pour dénoncer une pratique de la chaîne CNews visant, selon l'organisation, à contourner l'obligation de pluralisme dans les temps de parole. RSF qualifie cette pratique de "triche" et a rendu publique une enquête sur les chaînes d'information en continu.
Méthodologie de l'enquête
RSF indique avoir analysé les antennes de quatre chaînes françaises d'information en continu (BFMTV, CNews, franceinfo, LCI) pour la période du 1er au 31 mars 2025. L'analyse s'appuie, selon l'organisation, sur un outil automatique de capture d'écran qui a permis d'examiner environ 700 000 bandeaux diffusés.
Principaux constats
Selon RSF, CNews recourt à des "rattrapages nocturnes" et à des "tunnels" de diffusion de conférences ou de discours pour concentrer des interventions de responsables de partis de gauche (LFI, PS, PCF, EELV) durant la nuit et présenter davantage d'intervenants proches de l'extrême droite aux heures de forte audience. RSF présente des mesures d'exposition par plages horaires : aux heures de grande écoute (7-10 h et 18-21 h), l'extrême droite (y compris, selon RSF, le Rassemblement national et Philippe de Villiers) cumulerait 40,6 % d'exposition contre 15,4 % pour la gauche ; pendant la nuit (00 h-7 h), la gauche atteindrait 60,1 % d'exposition contre 1,6 % pour l'extrême droite. RSF indique qu'aucune autre chaîne étudiée n'a affiché un tel écart.
L'organisation signale également que, sur le mois étudié, CNews a couvert plus d'une centaine de faits de violence, un nombre présenté comme supérieur à celui des trois autres chaînes réunies.
Cas spécifiques mentionnés
RSF détaille la couverture médiatique de la condamnation de Marine Le Pen dans l'affaire des assistants de parlementaires européens, le 31 mars 2025. L'analyse indiquée par RSF attribue à CNews 147 minutes de temps de parole consacrées à la critique de la décision de justice contre 11 minutes consacrées à la défense. Pour comparaison, BFMTV afficherait des temps de parole proches de l'équilibre (64 minutes de défense, 65 minutes de critique).
Réactions et contexte réglementaire
RSF précise qu'elle saisira l'Arcom, l'autorité de régulation de l'audiovisuel et du numérique. Contactée par l'AFP, CNews n'avait pas réagi, selon les éléments rendus publics.
Dans un contexte plus large, la chaîne CNews appartient au groupe Canal+. RSF a déjà saisi l'Arcom par le passé au sujet de CNews et, à la suite d'une précédente saisine, le Conseil d'État a demandé en février 2024 à l'Arcom de renforcer ses contrôles et d'étendre le décompte des temps de parole aux participants aux programmes, y compris les chroniqueurs.
Parallèlement, des débats politiques portent sur l'impartialité des médias audiovisuels : certains responsables accusent CNews de promouvoir des positions proches de l'extrême droite, tandis que d'autres estiment que les médias publics favorisent des positions de gauche. Ces contestations ont alimenté l'ouverture d'une commission d'enquête parlementaire mentionnée dans les faits rapportés.
Suite attendue
La saisine annoncée par RSF doit permettre à l'Arcom d'examiner les éléments présentés par l'organisation et de déterminer s'il y a lieu d'engager des mesures en application des règles de pluralisme politique dans les temps de parole.








