Contexte et définition
L’urbanisme favorable à la santé (UFS) est une approche d’aménagement qui intègre les déterminants de la santé au cœur des décisions publiques en matière d’espace urbain, périurbain et rural. Portée notamment par le collectif d’enseignants-chercheurs UrbaSEPT et défendue par l’enseignante-chercheuse Anne Roué-Le Gall, cette démarche vise à orienter les politiques d’aménagement afin de réduire l’exposition des populations aux facteurs de risque et d’augmenter leur exposition aux facteurs de protection.
Déterminants pris en compte
L’UFS s’appuie sur une grille de déterminants de la santé qui couvre plusieurs dimensions :
- Expositions environnementales : qualité de l’air, de l’eau et des sols ; présence de polluants chimiques et de perturbateurs endocriniens.
- Caractéristiques du cadre de vie : exposition au bruit, à la lumière, gestion des températures et des eaux pluviales.
- Déterminants socio-économiques et d’accès : accès aux transports, aux espaces verts, aux commerces et services, à l’emploi ; qualité des interactions sociales.
- Facteurs individuels liés aux modes de vie : alimentation, activité physique et comportements quotidiens.
L’approche consiste à croiser ces déterminants pour identifier des leviers d’action susceptibles de produire des co-bénéfices pour la santé, l’environnement et le climat.
Objectifs opérationnels
Les actions recommandées visent deux orientations complémentaires :
- réduire l’exposition des populations à des facteurs de risque (par exemple limiter la pollution de l’air, diminuer la sédentarité) ;
- augmenter l’accès et l’exposition à des facteurs protecteurs (par exemple développer des infrastructures de mobilité active, aménager des espaces verts accessibles).
Les décisions d’aménagement sont ainsi évaluées en fonction de leurs impacts sanitaires et environnementaux, dans un contexte où les effets du changement climatique doivent être pris en compte.
Exemples d’applications
L’encadrement d’infrastructures favorisant la mobilité active illustre l’approche : la mise en place de pistes cyclables sécurisées, de continuités piétonnes et de connexions avec les transports en commun facilite l’intégration de l’activité physique dans les déplacements domicile-travail, ce qui peut contribuer à réduire la sédentarité.
La conception et la gestion des espaces verts urbains sont pensées pour réduire les impacts du bruit et des îlots de chaleur, pour gérer les risques d’inondation et pour offrir des lieux d’interactions sociales et de ressourcement.
Outils et guides produits
Deux guides ont été publiés pour soutenir les décideurs : "Agir pour un urbanisme favorable à la santé" (2014) et "ISadOrA" (2020), co-élaborés avec une agence d’urbanisme. Ces documents fournissent des entrées thématiques et des points d’appui méthodologiques, sans prétendre constituer des solutions clés en main.
Initiatives et expérimentations
Plusieurs collectivités ont engagé des démarches intégrant le principe d’UFS. Des expérimentations ont été conduites dans des quartiers, comme Maurepas à Rennes. Certaines collectivités territoriales ont intégré ces principes dans des documents de planification : le pays du Mans a inclus le principe d’UFS lors de la révision de son schéma de cohérence et d’organisation territoriale ; des adaptations ont également été signalées dans d’autres lieux, dont Miramas. Des démarches d’incitation à l’expérimentation sont conduites par des organismes tels que l’ADEME au travers de programmes dédiés.
Accompagnement des collectivités
Le déploiement de l’UFS implique des démarches internes de coordination : il est recommandé que les collectivités instituent des instances dédiées et identifient une personne pilote pour mobiliser des expertises pluridisciplinaires. Des postes de conseillers scientifiques ont été créés dans certaines municipalités à l’étranger (ex. Québec) pour appuyer la planification et la décision sur des enjeux complexes.
L’approche peut bénéficier d’analyses économiques intégrant les coûts évités à long terme pour éclairer les arbitrages budgétaires.
Formation et renforcement des compétences
Un diplôme d’établissement en santé publique et aménagement du territoire a été mis en place au sein de l’École des hautes études en santé publique (EHESP). Le cursus vise à former des professionnels destinés à jouer un rôle relais dans les régions : environ 70 personnes ont été formées jusqu’à présent, à raison d’environ quinze participants par an. La formation combine des modules répartis sur plusieurs mois, avec des sessions à l’école totalisant quatre semaines sur une période de quatre mois. Ce diplôme est payant ; son accès est l’objet de démarches visant à diversifier les modes de financement.
Recommandations pour la mise en œuvre
Les éléments suivants sont présentés comme des conditions facilitant l’intégration de l’UFS dans les politiques publiques :
- créer des instances de gouvernance locale dédiées et nommer des pilotes ;
- mobiliser des expertises plurielles (santé, urbanisme, environnement, économie) ;
- améliorer la connaissance des profils sanitaires et environnementaux des territoires en complément des données socio-économiques ;
- documenter les impacts via des outils méthodologiques et des évaluations afin d’éclairer les arbitrages budgétaires.
Conclusion
L’urbanisme favorable à la santé est conçu comme une méthode de planification qui relie décisions d’aménagement et déterminants de la santé, en recherchant des synergies entre protection sanitaire, qualité environnementale et adaptation au climat. Des guides, des formations et des expérimentations existent pour accompagner les collectivités dans sa mise en œuvre.








