Résumé de la décision
Le tribunal judiciaire de Nanterre a autorisé la poursuite de la commercialisation des eaux Perrier sous l’appellation « eau minérale naturelle ». Dans sa décision rendue le 18 novembre 2025, le tribunal a estimé que l’existence d’un risque sanitaire imminent lié aux eaux Perrier étiquetées « eau minérale naturelle » n’était pas établie avec l’évidence requise en référé, de sorte qu’aucun dommage imminent n’était démontré.
Contexte et antécédents
Des enquêtes de presse publiées au début de 2024 ont rapporté que certains industriels, dont Nestlé Waters, avaient eu recours à des traitements interdits ou controversés sur des eaux embouteillées (charbon actif, ultraviolets). Ces révélations ont entraîné des démarches parlementaires et administratives, des interventions des autorités de contrôle et la publication, en 2024, d’un rapport d’une commission d’enquête sénatoriale sur les pratiques des industriels et le contrôle public.
En 2021 et 2023, des échanges entre les représentants de Nestlé Waters, des membres du gouvernement et des autorités ont porté sur l’usage de procédés de filtration et sur un plan de transformation des procédés présenté par le groupe.
Recours introduit et arguments des parties
L’association de consommateurs UFC-Que Choisir a saisi le tribunal en référé au printemps 2025, demandant l’interdiction provisoire de commercialisation des eaux Perrier sous l’appellation « eau minérale naturelle » et la cessation de pratiques considérées comme trompeuses. L’association soutenait que les procédés de microfiltration mis en œuvre pouvaient remettre en cause le caractère d’eau minérale naturelle et présenter un risque pour la santé. Pour son avocat, il existait un risque pour le consommateur.
Nestlé Waters et ses filiales ont contesté ces demandes, affirmant que leurs produits restent sûrs et propres à la consommation. Le groupe a indiqué avoir adapté ses procédés et a présenté un plan de transformation auprès des autorités.
Motifs retenus par le tribunal
Saisi en référé, le tribunal de Nanterre a considéré que l’existence d’un risque sanitaire imminent n’était pas établie avec l’évidence requise pour justifier une suspension de commercialisation. Le tribunal a déclaré certaines demandes de l’association irrecevables faute de qualité à défendre et a jugé qu’il n’y avait pas lieu à référé pour les demandes de retrait du marché et de rappel des eaux pour lesquelles l’association sollicitait une mesure d’urgence.
La décision de référé ne préjuge pas du fond des autorisations préfectorales, des procédures administratives ou d’éventuelles poursuites pénales, qui relèvent d’autres instances et d’autres procédures.
Mesures techniques et démarches administratives suivies
À la suite des révélations et des interventions des autorités, Nestlé Waters avait eu recours à une microfiltration de 0,2 micron, dont la légalité et l’impact sur le profil microbiologique de l’eau ont été contestés. Sous injonction préfectorale, le groupe a ensuite modifié son procédé en adoptant une microfiltration à 0,45 micron.
Le groupe a déposé de nouvelles demandes d’autorisations préfectorales pour l’exploitation de certains forages et pour la commercialisation de certaines références sous l’appellation « eau minérale naturelle ». Plusieurs décisions préfectorales étaient en attente au moment de la décision de référé.
Réactions et communications
Nestlé Waters a communiqué que la sécurité alimentaire des eaux Source Perrier était garantie et a salué la décision du tribunal. L’entreprise a engagé des campagnes d’information en magasin et dans la presse pour expliquer les adaptations techniques réalisées et la situation réglementaire de certaines références.
UFC-Que Choisir a maintenu ses critiques et a fait part de son mécontentement. Sa présidente a déclaré être « en colère » et n’a pas indiqué si l’association interjetterait appel.
Plusieurs acteurs du secteur, regroupés au sein de la Maison des eaux minérales naturelles, ont lancé une campagne appelant au respect des règles de filtration autorisées et à la préservation de la « pureté originelle » des sources, estimant que l’appellation « eau minérale naturelle » implique des conditions strictes de traitement.
Conséquences et suites procédurales
La commercialisation de certaines références Perrier a perduré sans interruption à la suite de la décision de référé. Selon les informations communiquées par les parties, le nombre de foyers acheteurs des bouteilles Perrier classiques est resté stable et les ventes ont été déclarées « en croissance » sur le dernier trimestre par l’entreprise. En revanche, la production de certaines références, notamment les bouteilles bleues Perrier fines bulles, a diminué en raison de la suspension de certains forages.
Sur le plan réglementaire et pénal, la décision de référé n’a pas statué sur le fond des autorisations préfectorales ni sur d’éventuelles poursuites ; ces questions sont renvoyées à d’autres procédures et décisions des autorités compétentes.








