Contexte
Le valproate et ses dérivés sont prescrits dans le traitement de l’épilepsie et des troubles bipolaires. Ces médicaments sont contre‑indiqués pendant la grossesse en raison du risque accru de malformations congénitales et de troubles neurodéveloppementaux (TND) chez l’enfant. Des études expérimentales chez l’animal avaient déjà suggéré que l’exposition paternelle pouvait affecter la descendance ; les données humaines restaient jusque‑là limitées.
Objectif et méthode de l’étude
Une étude du groupe d’intérêt scientifique (GIS) ANSM–Cnam Epi‑Phare, publiée le 6 novembre 2025, a évalué l’association entre l’exposition paternelle au valproate pendant la période de spermatogenèse et le risque de TND chez l’enfant. Les auteurs ont utilisé les données du Système national des données de santé (SNDS) pour inclure les enfants nés entre 2010 et 2015. Parmi les 2 832 850 enfants analysés, 4 773 étaient nés d’un père ayant reçu du valproate au cours de la période de spermatogenèse.
Résultats
L’analyse rapporte une association entre l’exposition paternelle au valproate et une augmentation du risque de troubles neurodéveloppementaux chez l’enfant.
Troubles du développement intellectuel : le risque relatif apparaît environ doublé chez les enfants exposés par le père, ce qui correspond à environ 3,5 cas supplémentaires pour 1 000 enfants nés d’un père traité au moment de la conception.
TDAH (trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité), troubles du spectre de l’autisme et troubles de la communication : les données suggèrent une augmentation du risque d’environ 20 à 25 % pour ces catégories. Ces résultats sont présentés comme moins robustes et nécessitent des confirmations supplémentaires.
Mesures réglementaires et d’information
Des signaux antérieurs avaient déjà évoqué, dès 2023, une possible augmentation du risque de TND en cas d’exposition paternelle au valproate dans les trois mois précédant la conception, conduisant à des recommandations d’information et d’étiquetage.
En 2024, le comité de pharmacovigilance (PRAC) de l’Agence européenne des médicaments a recommandé des mesures visant à limiter l’exposition paternelle au valproate et à mieux informer les patients et les professionnels de santé.
En 2025, les conditions de prescription et de dispensation ont été modifiées en France : patient et prescripteur doivent cosigner annuellement une attestation d’information partagée. Cette obligation s’applique, pour les initiations de traitement, depuis le 6 janvier 2025, et pour les renouvellements depuis le 30 juin 2025 ; la dispensation en pharmacie est conditionnée à la présentation d’une attestation datant de moins d’un an.
Interprétation et limites
L’étude apporte des éléments d’association entre l’exposition paternelle au valproate et un risque accru de certains troubles neurodéveloppementaux chez l’enfant. Les estimations varient selon les catégories de TND et, pour certains outcomes (TDAH, troubles du spectre autistique, troubles de la communication), les résultats sont décrits comme nécessitant des confirmations complémentaires. Les données humaines antérieures étaient peu nombreuses, ce qui limite l’évidence causale.
Conséquences cliniques
Ces résultats ont conduit à des actions d’information, à des adaptations des modalités de prescription et de dispensation, et soulignent la nécessité d’une information claire des patients en âge de procréer, y compris des hommes traités par valproate, sur les risques potentiels pour la descendance.








