Introduction
La ministre déléguée chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes, Aurore Bergé, a présenté un projet de loi‑cadre composé de 53 mesures visant à renforcer la prévention, la détection, la caractérisation juridique, l'accompagnement et la sanction des violences sexuelles et intrafamiliales. Le texte est étendu aux violences commises contre les enfants. La ministre a indiqué que le projet était prêt et a exprimé la volonté de le voir inscrit à l'ordre du jour parlementaire dès que possible.
Objectifs et portée du projet
Le projet vise à établir un cadre global pour la lutte contre les violences sexuelles et les violences intrafamiliales, en consolidant des règles dispersées et en traitant des situations insuffisamment prises en compte par le droit actuel, notamment le contrôle coercitif et la question de l'imprescriptibilité civile des crimes sexuels sur mineur. Les mesures proposées sont regroupées autour de cinq axes : formation, détection, prévention, caractérisation juridique et sanction.
Mesures destinées aux victimes
Le projet prévoit des dispositions pour faciliter le dépôt et le suivi des plaintes : accès inconditionnel à l'aide juridictionnelle pour les victimes de violences intrafamiliales et de violences sexuelles ; possibilité pour la victime d'être assistée par un avocat lors des examens médicaux ; enregistrement du premier témoignage pour éviter les répétitions ; obligation de motiver systématiquement un classement sans suite et ouverture d'un droit de recours ; information systématique de la victime sur son droit de refuser une confrontation avec l'auteur présumé. Le texte vise à améliorer l'accompagnement des victimes au cours de la procédure judiciaire et à réduire la durée de traitement des affaires.
Caractérisation du contrôle coercitif et des violences non physiques
Le texte propose d'intégrer de manière plus explicite au droit les formes de violences non physiques qualifiables de contrôle coercitif, en citant des situations telles que l'interdiction d'accès à des moyens financiers, le traçage par GPS, l'installation de dispositifs de localisation ou le contrôle des relations sociales. Ces comportements doivent être davantage pris en compte et caractérisés juridiquement.
Protection des mineurs et contrôle des professionnels
Le projet étend les obligations de contrôle des antécédents judiciaires à l'ensemble des personnes en contact avec des mineurs, quels que soient leur statut et leur contrat (fonctionnaire, vacataire, stagiaire, contractuel, intérimaire). Il est proposé d'instituer un contrôle systématique et renouvelable chaque année du casier judiciaire pour ces professionnels et d'empêcher le recrutement sans extrait de casier judiciaire vierge. En matière d'inceste, le projet prévoit l'interdiction provisoire du droit de visite et de tout contact avec l'enfant dès l'ouverture d'une enquête préliminaire.
Mesures relatives à la prostitution et aux plateformes en ligne
Le projet comprend des dispositions visant les acteurs de plateformes de contenu à caractère sexuel, avec l'intention de qualifier les gestionnaires de certaines plateformes comme susceptibles d'être poursuivis pour proxénétisme lorsqu'ils tirent profit de la mise en relation ou de l'exploitation d'actes prostitutionnels, y compris lorsque des mineurs sont concernés.
Hébergement d'urgence et relogement (nouveau)
Le gouvernement a signé une circulaire adressée aux préfets pour faciliter l'accès à l'hébergement des femmes victimes de violences. La circulaire demande l'élaboration de protocoles locaux d'hébergement ou de relogement donnant priorité aux femmes majeures et à leurs enfants qui nécessitent une décohabitation ou un éloignement pour se mettre en sécurité. La circulaire précise que l'accès à un hébergement spécialisé ne doit pas être subordonné à la production préalable d'une attestation de violences (plainte ou certificat médical). Elle recommande la coopération régionale entre services intégrés d'accueil et d'orientation (SIAO) et bailleurs sociaux pour faciliter l'éloignement dans les situations de grave danger et constituer des dossiers de demande de logement social en vue d'un relogement durable.
Ressources et capacités d'hébergement (nouveau)
Le gouvernement indique que les places d'hébergement dédiées aux femmes victimes de violences ont été portées de 5 100 à plus de 11 000 depuis 2017 et que le budget consacré a augmenté d'environ 30 % depuis 2021. Les autorités signalent par ailleurs que près de 30 % des appels au 115 sont effectués par des femmes.
Initiatives associatives et dispositifs complémentaires (nouveau)
Parallèlement aux dispositifs étatiques, des initiatives associatives et citoyennes proposent des mises à l'abri temporaires complémentaires, notamment par des réseaux de particuliers et de professionnels mettant des logements ou des chambres à disposition pour des durées provisoires.
Mise en œuvre et calendrier parlementaire
La ministre a remis le projet aux autorités compétentes et a indiqué son souhait de le voir inscrit à l'ordre du jour parlementaire. Le projet a été déposé auprès du président de la République et du ministre en charge. Une proposition distincte, portée par une coalition transpartisane de parlementaires et comportant un nombre de dispositions plus large, a été présentée parallèlement. Le texte devra suivre les procédures parlementaires, être discuté en commission et en séance, et faire l'objet d'actes réglementaires pour préciser certaines modalités d'application (contrôles annuels de casier judiciaire, qualifications juridiques nouvelles, modalités d'accès à l'aide juridictionnelle, etc.).
Contexte, données et réactions
Les annonces interviennent dans un contexte de mobilisation associative et de débats publics sur la prévention des violences et la protection des mineurs. Les associations et collectifs continuent de recenser et d'alerter sur le nombre de féminicides et sur d'autres formes de violences (harcèlement, violences psychologiques, suicides liés aux violences). Des actions locales et des campagnes de sensibilisation ont eu lieu à l'occasion de la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes. Si certaines données chiffrées diffèrent selon les sources (recensements associatifs, observatoires publics), les autorités reconnaissent la nécessité d'un renforcement des moyens et d'une meilleure coordination des réponses.
Prochaines étapes
Le projet doit encore être soumis à l'examen des assemblées compétentes avant d'entrer en vigueur. Les modalités d'application de plusieurs mesures devront être précisées par le texte législatif et par des actes réglementaires. Le calendrier de mise en œuvre et les besoins en moyens opérationnels seront précisés au cours de l'examen parlementaire et de la préparation des textes d'application.








