Contexte
Le gouvernement français a engagé une procédure visant la plateforme Shein afin d’obtenir la démonstration de la conformité de l’ensemble de ses contenus et offres à la législation française. Cette décision fait suite à des signalements et constats de produits potentiellement illicites ou non conformes vendus via la marketplace de la plateforme.
Constatations et enquêtes
La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a signalé la mise en vente, via la marketplace de Shein, de poupées à caractère sexuel présentant l’apparence d’enfants. Ces constats ont été transmis aux juridictions compétentes et ont conduit à l’ouverture d’une enquête judiciaire.
Des élus et responsables ont également signalé la présence d’armes mises en vente par des vendeurs tiers, notamment des machettes et des coups-de-poing américains. Un membre du gouvernement a déclaré qu’une des armes recensées sur la plateforme avait été impliquée dans la mort d’un adolescent. Les éléments signalés ont été transmis au parquet de Paris.
Par ailleurs, des opérations de contrôle sur les flux de colis en provenance des plateformes d’e‑commerce ont relevé la mise en circulation de produits non conformes, notamment des produits cosmétiques non autorisés, des jouets dangereux, des contrefaçons et des appareils défaillants.
Un homme a été interpellé après avoir commandé une poupée sexuelle depuis la Chine; le parquet d’Aix-en-Provence a précisé que le colis intercepté dans les Bouches-du-Rhône n’était pas lié à un envoi identifié comme provenant de Shein.
Procédures administratives, judiciaires et européennes
Les autorités ont engagé une procédure dite de « suspension » fondée sur plusieurs volets. Un volet administratif s’appuie sur les pouvoirs prévus par le Code de la consommation (article L521-3), qui permet, sous conditions, de déréférencer un site, d’en limiter l’accès ou de bloquer un nom de domaine pour une durée maximale de trois mois renouvelable une fois, puis, en cas de persistance de l’infraction, d’en demander la suppression ou le transfert à l’autorité compétente.
Un volet judiciaire a été initié par une saisine des juridictions compétentes en vue d’obtenir, le cas échéant en procédure accélérée, des mesures de blocage du site sur le fondement de la loi relative à la confiance dans l’économie numérique.
Les autorités françaises ont par ailleurs sollicité l’intervention des institutions européennes et demandé à la Commission d’envisager des mesures au niveau communautaire. Des responsables gouvernementaux ont évoqué l’éventualité de sanctions financières prévues par le droit européen applicables à des plateformes qui ne respecteraient pas leurs obligations.
Le gouvernement a indiqué qu’il suivrait les voies administratives et judiciaires appropriées en fonction des éléments constatés et des éléments fournis par la plateforme.
Mesures opérationnelles et contrôles aux frontières
Les services des douanes, la DGCCRF et la gendarmerie du transport aérien ont conduit une opération de contrôle coordonnée sur les flux de colis à l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle visant à ouvrir et vérifier 100 % des colis arrivés depuis vingt-quatre heures et à contrôler un grand nombre de colis en provenance des flux d’e‑commerce; les autorités ont indiqué viser le contrôle d’environ 200 000 colis dans le cadre de cette opération.
Des ministres se sont rendus sur place pour suivre les opérations et présenter un point presse sur le périmètre et le résultat des contrôles.
Mesures techniques et effets pratiques
Les autorités ont rappelé que des mesures de blocage peuvent intervenir à plusieurs niveaux : accès au site, référencement sur les moteurs de recherche et disponibilité dans les stores d’applications. Elles ont également indiqué que des outils techniques (filtrage par mots‑clés, reconnaissance d’images) peuvent être mobilisés pour restreindre l’accès à certains produits.
Il a été souligné que des contournements techniques tels que l’usage d’un réseau privé virtuel (VPN) permettent de consulter une plateforme suspendue depuis l’étranger et que le blocage sollicité pour la France ne s’applique qu’aux opérateurs sous compétence française.
Réponse et actions de Shein
La plateforme a annoncé la suspension temporaire de sa marketplace en France, c’est‑à‑dire la mise en ligne de produits par des vendeurs tiers, en indiquant vouloir conduire une revue des procédures de vérification des fiches produits et des vendeurs. Un porte‑parole de l’entreprise a indiqué la volonté d’un dialogue avec les autorités et la mise en place de contrôles complémentaires.
Ouverture d’un espace de vente physique et réactions
Shein a ouvert un espace de vente permanent au BHV Marais à Paris. L’inauguration a donné lieu à une fréquentation de clients et à des manifestations. Plusieurs enseignes ont annoncé leur retrait du BHV en réaction à cette implantation. Des représentants politiques et des organisations professionnelles ont exprimé des positions diverses et appelé à une coordination européenne pour encadrer les plateformes de commerce en ligne.
Initiatives parlementaires et suites prévues
Des parlementaires ont annoncé des travaux visant à coordonner l’action des États membres et des institutions européennes sur la régulation des plateformes. Une mission d’information parlementaire a inscrit l’audition des dirigeants de la plateforme parmi ses travaux.
Les suites dépendront des investigations menées par la DGCCRF, des constats rendus par les services douaniers et des décisions des juridictions saisies. Le gouvernement a indiqué qu’il procéderait à des points d’étape pour apprécier la conformité des contenus et des offres proposés sur la plateforme.








