Résumé
La Cour de cassation a annulé un arrêt de la cour d'appel de Paris et a demandé le réexamen de la question de la prescription dans l'enquête visant Alexis Kohler, mis en examen pour prise illégale d'intérêts en lien avec ses liens familiaux avec l'armateur MSC.
Faits et contexte
Alexis Kohler a occupé des fonctions de haut fonctionnaire. Il a représenté l'Agence des participations de l'État (APE) aux conseils d'administration de STX France (devenu Chantiers de l'Atlantique) et du Grand port maritime du Havre entre 2009 et 2012. Il a ensuite travaillé à Bercy, au cabinet de Pierre Moscovici puis d'Emmanuel Macron, entre 2012 et 2016. Le groupe MSC est dirigé par des membres de la famille Aponte, apparentés à Alexis Kohler. Une enquête a été ouverte et le dossier était instruit depuis juin 2020. Alexis Kohler a été mis en examen pour prise illégale d'intérêts.
Procédure judiciaire antérieure
En novembre 2024, la cour d'appel de Paris a rejeté l'argument de prescription soulevé par la défense d'Alexis Kohler. La cour considérait notamment que la dissimulation alléguée de ses liens familiaux rendait l'infraction « occulte » et empêchait le point de départ de la prescription de courir avant la révélation publique.
Décision de la Cour de cassation
Le 10 septembre 2025, la Cour de cassation a annulé l'arrêt de la cour d'appel en considération d'un défaut de motivation. Elle a renvoyé l'affaire à la chambre de l'instruction de la cour d'appel, en demandant qu'elle réexamine la question de la prescription, y compris dans une formation "autrement composée". La Cour de cassation a estimé que « le silence gardé par M. Kohler, au surplus à l'égard de seulement certains des dirigeants des entités au conseil d'administration desquelles il siégeait, n'est pas à lui seul de nature à caractériser un acte positif constitutif d'une manoeuvre caractérisée de dissimulation ». Elle a également relevé que la chambre de l'instruction n'avait pas établi l'existence d'un concert frauduleux destiné à empêcher la découverte de l'infraction.
Arguments des parties
- Association Anticor et juges d'instruction : ils soutiennent que l'éventuelle dissimulation des liens familiaux a rendu l'infraction « occulte » jusqu'à sa révélation publique, ce qui, selon eux, empêche la prescription et permet la poursuite intégrale des faits. Lors d'une audience, l'avocat d'Anticor a mentionné des épisodes entre 2009 et 2016 où M. Kohler aurait participé à des décisions relatives à MSC et a estimé que des intérêts publics avaient été lésés.
- Défense et ministère public : les avocats d'Alexis Kohler ont soutenu que le délai de prescription avait expiré, arguant qu'il n'avait pas commencé en 2018 avec des articles de presse. Le ministère public avait également soutenu une prescription plus large. L'entourage d'Alexis Kohler a déclaré qu'il n'avait pas dissimulé ses liens familiaux à sa hiérarchie et à son entourage professionnel.
Suite de la procédure
La chambre de l'instruction doit réexaminer la question de la prescription conformément aux instructions de la Cour de cassation. La décision de la chambre pourra déterminer si les faits sont prescrits ou si l'instruction se poursuit. Aucun jugement sur le fond n'a été prononcé à ce stade.