Contexte des négociations
Les représentants de 184 pays se sont réunis à Genève pour tenter d’élaborer le premier traité international juridiquement contraignant visant à lutter contre la pollution plastique. Ce traité aurait pour objectif de réguler la production, la consommation et la gestion de la fin de vie des plastiques au niveau mondial. Chaque année, la pollution plastique entraîne le rejet estimé de 22 millions de tonnes de déchets dans l’environnement, affectant les sols, les océans, la biodiversité et la santé humaine.
Cette nouvelle session des négociations intervient à la suite de l’échec d’une précédente réunion tenue à Busan, en Corée du Sud, à la fin de l'année précédente.
Divergences majeures entre les parties
Les négociations font face à une forte opposition de la part d’un groupe de pays principalement producteurs de pétrole, comprenant notamment l’Arabie saoudite, d’autres États arabes, la Russie et l’Iran. Ces pays, réunis en un groupe informel appelé « like minded », refusent l’introduction dans le traité de toute mesure contraignante sur la limitation de la production de plastique vierge ou sur l’origine pétrolière du plastique. Leur proposition vise à restreindre le traité à la gestion des déchets (collecte, tri, recyclage), en particulier dans les pays en développement, sans prendre en considération le « cycle de vie » complet du plastique comme le prévoyait la résolution initiale.
À l’opposé, une coalition de pays souhaite inclure dans le texte des objectifs qualitatifs et quantitatifs de réduction de la production, conformément à l’ambition de juguler la pollution d’origine plastique sur son ensemble.
Autres points de discorde
Un autre sujet de désaccord concerne l’article 3 du projet de traité, relatif à l’établissement d’une liste de substances chimiques considérées comme potentiellement dangereuses pour l’environnement ou la santé humaine, tels les additifs, colorants, phtalates et substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS). Des industriels de la chimie ainsi que certains États, dont la Chine, s’opposent à l’établissement d’une telle liste à l’échelle internationale. Certains pays préfèrent que chaque État puisse établir sa propre liste, un mécanisme déjà possible sans traité international.
Position et poids de la Chine
La Chine est mentionnée comme le premier producteur mondial de plastiques, fabriquant 34 % des polymères plastiques les plus utilisés (polyéthylène, polypropylène, polyéthylène téréphtalate, polystyrène). Le groupe public chinois Sinopec représente à lui seul 5,4 % de la production mondiale de ces polymères. Certains observateurs notent une absence d’ouverture de la Chine sur les propositions de mesures contraignantes.
Prises de position et rôle des acteurs de la société civile
Plusieurs ONG, dont Greenpeace, ont signalé une présence accrue de représentants du secteur pétrochimique lors des négociations, exprimant des préoccupations quant à leur influence possible sur le processus. D’autres organisations de la société civile, telles que le WWF et le CIEL, relèvent la difficulté à sortir de l’impasse actuelle et considèrent que la multiplication des positionnements tranchés entre les États compromet l’avancée vers un compromis.
Scénarios et perspectives institutionnelles
Historiquement, l’adoption des grands traités environnementaux s’est faite sur la base du consensus. Une possibilité évoquée en cas d’impasse serait de recourir à un vote, ce qui constituerait une exception à la règle, à l’exception notable du traité sur les ventes d’armes.
Interventions des organisations internationales
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a exhorté les pays à instaurer des dispositifs de protection de la santé publique face aux risques croissants associés à la pollution plastique. Les études sur les microplastiques et nanoplastiques indiquent leur présence dans plusieurs compartiments environnementaux et biologiques, y compris dans des tissus humains, avec des implications sanitaires en cours d’évaluation.
État actuel et enjeux
À ce stade des négociations, aucun consensus n’a été identifié sur les questions centrales du projet de traité, à la fois sur la réduction de la production de plastique vierge et sur la gestion des substances chimiques dangereuses. Les discussions se poursuivent dans un contexte de concurrence d’intérêts nationaux divergents et d’absence de compromis tangible sur la portée et la nature obligatoire du futur traité.