Contexte et objet du rapport
Un groupe de six économistes et universitaires, dirigé par le lauréat du prix Nobel d'économie Joseph Stiglitz, a remis un rapport commandé par la présidence sud-africaine du G20. Le document a été présenté au président sud-africain Cyril Ramaphosa le 4 novembre 2025. Il identifie ce qu'il appelle une « crise des inégalités » et appelle les dirigeants du G20 à traiter la question au même niveau que l'urgence climatique.
Principaux constats
Le rapport indique plusieurs éléments chiffrés et tendances mondiales : un habitant sur quatre dans le monde saute régulièrement un repas ; entre 2000 et 2024, le 1 % le plus riche de la population mondiale a capté 41 % de l'ensemble des nouvelles richesses, tandis que les 50 % les plus pauvres ont reçu environ 1 % de ces nouvelles richesses. Les auteurs estiment par ailleurs qu'environ 1 000 milliardaires transmettront, dans les trente années à venir, plus de 5 200 milliards de dollars à leurs héritiers, en grande partie sans taxation effective.
Le rapport distingue l'évolution des inégalités de revenus, qui ont diminué entre 2000 et 2024 en partie en raison du développement économique de la Chine, et l'accroissement des inégalités de richesse, qui ont continué de croître.
Causes et mécanismes identifiés
Les auteurs mettent en avant plusieurs mécanismes contribuant aux inégalités de richesse : accumulation concentrée du capital, transmission intergénérationnelle de patrimoines importants, pratiques d'optimisation et d'évasion fiscale, positions monopolistiques sur certains marchés, et politiques commerciales ou tarifaires susceptibles d'affecter la répartition des gains économiques.
Le rapport souligne que des choix politiques et institutionnels influencent ces mécanismes et que certaines orientations peuvent aggraver les écarts de richesse à l'échelle internationale.
Recommandations et mesures proposées
Les experts recommandent la création d'un panel international sur les inégalités pour analyser les mécanismes (notamment les techniques d'évasion fiscale) et éclairer l'élaboration de politiques publiques. Parmi les pistes avancées figurent :
- des mesures de justice fiscale visant une contribution plus large des multinationales et des personnes les plus fortunées ;
- des actions pour stabiliser les prix des biens essentiels ;
- la réduction des positions monopolistiques et des pratiques anticoncurrentielles ;
- la restructuration de la dette des pays à revenu faible ou intermédiaire.
Ces mesures sont présentées comme des instruments pour limiter la transmission des inégalités entre générations et pour améliorer la répartition des ressources.
Liens entre inégalités et gouvernance
Le rapport établit un lien entre des niveaux élevés d'inégalité économique et des effets sur la gouvernance : érosion de la confiance dans les institutions, polarisation politique accrue, montée de tensions sociales et risque d'affaiblissement des normes démocratiques au profit de formes d'autoritarisme. Les auteurs estiment que la persistance d'inégalités importantes peut modifier les dynamiques politiques et économiques à l'échelle nationale et internationale.
Contexte institutionnel et réactions
Le rapport a été commandé par la présidence sud-africaine du G20, qui organise un sommet à Johannesburg les 22 et 23 novembre 2025. L'Afrique du Sud est, selon le rapport, le premier pays africain à présider le G20 dans cette configuration. Le document mentionne des réserves quant au soutien attendu de certains pays pour la proposition de création d'un panel international et signale que des décisions politiques, y compris des mesures commerciales, peuvent avoir des effets distributifs à l'échelle mondiale. Le rapport note également que, selon les auteurs, les relations entre l'Afrique du Sud et les États-Unis sont tendues et que l'administration américaine a fait savoir qu'elle ne participerait pas au sommet.
Objectif affiché par les auteurs et par la présidence sud-africaine
Les auteurs demandent une reconnaissance de la question des inégalités comme enjeu mondial comparable à d'autres urgences internationales et proposent des outils d'analyse et des actions concertées au niveau du G20 pour en réduire les effets socio-économiques et politiques. Le président sud-africain a indiqué vouloir faire de ce thème une priorité lors du sommet.








