Contexte et actifs concernés
Les réserves de la banque centrale russe détenues dans l'Union européenne ont été gelées dans le cadre des sanctions décidées par les États membres après l'invasion de l'Ukraine. Le montant total des avoirs immobilisés s'élève à environ 210 milliards d'euros, dont environ 185 milliards sont détenus chez Euroclear à Bruxelles.
Décision des représentants permanents de l'UE
Le Comité des représentants permanents (Coreper) des États membres de l'Union européenne a approuvé une proposition visant à pérenniser l'immobilisation des actifs russes sur une base plus durable. La décision, prise à la majorité, invoque l'article 122 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, qui permet d'adopter des mesures exceptionnelles en cas d'urgence. Cette approbation a été formalisée par un lancement d'une procédure écrite destinée à conduire à une décision du Conseil.
Le mécanisme proposé vise à supprimer l'obligation de renouveler à l'unanimité, tous les six mois, le régime de sanctions qui constitue la base juridique du gel des avoirs. Selon cette procédure, l'immobilisation des actifs resterait en place "jusqu'à la fin de l'agression russe" contre l'Ukraine, sans renouvellement semestriel requis.
Position des États membres et points de désaccord
Plusieurs États membres soutiennent l'utilisation d'une partie de ces avoirs pour financer un prêt à l'Ukraine, qualifié de "prêt de réparations" dans les discussions et chiffré par certaines propositions à au moins 90 milliards d'euros. D'autres options, comme un emprunt commun sur les marchés, ont également été examinées mais requièrent l'unanimité.
La Belgique a exprimé des réserves sur l'emploi de ces actifs sans garanties financières et juridiques jugées suffisantes. Le Premier ministre belge a indiqué qu'il ferait tout pour bloquer la décision en l'absence de garanties robustes couvrant la mutualisation des risques, l'accès immédiat à des liquidités pour faire face aux obligations et la protection des entreprises et du dépositaire central de titres.
La Hongrie a, par le passé, mis en cause le renouvellement semestriel des sanctions en menaçant de veto, ce qui figure parmi les motifs ayant motivé le recours à l'article 122 pour permettre une décision à la majorité.
Questions juridiques soulevées
L'utilisation de l'article 122 fait l'objet d'interrogations juridiques. Des voix au sein des États membres et des experts ont remis en question la base légale d'un recours à cet article en l'absence d'un état d'urgence stricto sensu et n'excluent pas des recours devant la Cour de justice de l'Union européenne.
La Commission européenne a défendu l'emploi de l'article 122 en estimant que l'agression contre l'Ukraine affecte la situation économique en Europe et que l'article permettrait d'acquérir des ressources pour répondre à cette situation.
Procédure en cours et calendrier
Après l'accord du Coreper, la proposition a été soumise à une procédure écrite en vue d'une décision formelle du Conseil. La position finale de la Belgique devait être rendue publique lors de cette procédure écrite.
Parallèlement aux discussions au sein de l'UE, la Banque centrale de Russie a engagé une procédure judiciaire. Selon des communiqués publiés par des agences de presse, la banque centrale russe a saisi un tribunal d'arbitrage à Moscou, alléguant que des actions d'Euroclear entravent sa capacité à disposer librement de ses fonds et demandant la restitution des avoirs.
Euroclear a indiqué ne pas pouvoir réagir immédiatement à l'annonce de cette démarche. La procédure engagée par la banque centrale russe et les démarches internes à l'UE sont conduites en parallèle ; leur interaction juridique et politique demeure sujette à évolution.
Situation actuelle
Au terme des étapes décrites, la question de l'utilisation éventuelle des avoirs gelés pour financer un prêt à l'Ukraine reste en discussion entre les États membres. Des décisions supplémentaires au niveau du Conseil de l'Union européenne et, le cas échéant, des recours judiciaires, détermineront la mise en œuvre effective des mesures envisagées.








