Contexte
La justice restaurative désigne des dispositifs visant à créer un espace de dialogue entre personnes victimes et personnes mises en cause afin de permettre une réparation symbolique, une reconnaissance des faits ou un apaisement relationnel. En France, des expérimentations ont eu lieu au début des années 2010, notamment des rencontres détenus/victimes organisées en milieu carcéral. Une loi relative à l’individualisation des peines a été adoptée en 2014, et des mesures de justice restaurative ont été mises en œuvre à partir de 2017.
Principes et modalités
Les mesures de justice restaurative sont conçues comme complémentaires à la justice pénale. Elles reposent, selon les textes et les pratiques, sur des principes récurrents : information et consentement des participants, reconnaissance des faits, présence d’un tiers indépendant et formé, contrôle de l’autorité judiciaire et confidentialité des échanges. Les formats observés comprennent des rencontres de groupe (trois à six personnes) entre auteurs et victimes ne relevant pas de la même affaire, des médiations restauratives entre auteur et victime d’une même infraction, ou des échanges indirects (courriers, récits préparatoires). Les domaines concernés vont des infractions de droit commun aux violences les plus graves.
Déploiement et évaluations
Des organismes et instituts ayant travaillé sur le sujet ont documenté le nombre et les effets des mesures. Les bilans indiquent un nombre limité de mesures clôturées annuellement et un nombre plus élevé de mesures en cours. Les évaluations menées sur plusieurs années signalent des effets positifs ressentis par les participants à court terme, des impacts perçus parmi les professionnels (personnel pénitentiaire, médiateurs) et des limites concernant l’évaluation des effets à long terme. Des témoignages de personnes victimes rapportent des améliorations individuelles en matière de bien‑être ou de reconstruction, selon les enquêtes publiées.
Demande formulée par Salah Abdeslam
La défense de Salah Abdeslam a indiqué qu’il souhaitait entrer en contact avec des parties civiles dans le cadre d’une démarche présentée comme relevant de la justice restaurative. L’avocate a précisé que l’objectif invoqué était d’évoquer la détention, le procès et, éventuellement, d’échanger si les victimes le souhaitaient. Des représentants d’associations de victimes ont indiqué qu’un certain nombre de personnes concernées se seraient déclaré·e·s intéressé·e·s par de telles démarches.
Réactions des parties prenantes
Des représentants d’associations de victimes ont exprimé un intérêt pour la mise en œuvre de rencontres ou d’échanges encadrés. D’autres personnes, ayant été victimes d’attentats ou proches de victimes, ont critiqué publiquement la démarche et estimé que le recours à la justice restaurative était inadapté au contexte des attentats terroristes. Ces oppositions reposent notamment sur l’argument selon lequel le terrorisme relèverait d’une qualification particulière distincte des infractions de droit commun et sur la crainte d’une banalisation des faits.
Encadrement institutionnel et questions procédurales
Des autorités judiciaires et des acteurs institutionnels ont évoqué la nécessité d’un encadrement spécifique si des initiatives de justice restaurative devaient s’appliquer au champ du terrorisme. Des échanges ont été signalés entre le parquet national antiterroriste et des collectifs de victimes en vue de réfléchir à une gouvernance ou à un comité de pilotage pour encadrer d’éventuelles initiatives, en associant les parties prenantes.
Parallèlement, la justice restaurative ne se substitue pas aux procédures pénales : toute mesure de rencontre ou de médiation doit respecter le contrôle judiciaire, le consentement des participants et les conditions de sécurité et de confidentialité prévues.
Situation judiciaire et pénitentiaire de Salah Abdeslam
Salah Abdeslam est incarcéré et a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour les attentats du 13 novembre 2015. Il a récemment été concerné par des actes d’enquête en lien avec des éléments saisis lors d’une visite en parloir et a fait l’objet de gardes à vue suivies d’un retour en détention. Une visiteuse a été mise en examen et incarcérée dans ce cadre. Des autorités de sécurité ont indiqué qu’il demeurait perçu comme radicalisé par leurs services, tout en précisant qu’il n’était pas mis en cause dans certains projets d’attentat évoqués publiquement.
Points de tension et enjeux
La proposition de rencontres entre parties civiles et une personne condamnée pour des actes terroristes soulève des questions de principe, de légitimité et de sécurité : qualification des infractions, consentement des victimes, cadre méthodologique, préparation psychologique, contrôle judiciaire et modalités de protection des participants. Les évaluations disponibles montrent des bénéfices potentiels pour certaines victimes dans des contextes variés, tout en soulignant la nécessité d’un protocole strict et de ressources pour garantir la sécurité et la qualité des processus, en particulier en cas d’infractions graves.
Situation médiatique et réactions symboliques
L’annonce de la demande a donné lieu à des réactions publiques et médiatiques diverses, y compris des prises de position de victimes, d’associations et d’acteurs des médias. Certaines organisations et représentants des victimes ont confirmé un intérêt pour l’exploration d’options restauratives encadrées, tandis que d’autres ont exprimé une opposition ou des réserves quant à ce type de démarche dans le cadre d’actes terroristes.








