Résumé de la décision
La Haute Autorité de Santé (HAS) a refusé d’accorder un « accès précoce » au Leqembi (lécanémab) en France, décision publiée le 9 septembre 2025. Cet avis empêche, pour l’instant, le remboursement immédiat du médicament au prix proposé par son fabricant dans le cadre de cette procédure accélérée.
Le médicament et son mode d’action
Leqembi est le nom commercial du lécanémab, un anticorps monoclonal développé par Biogen et Eisai. Le médicament est administré par perfusion intraveineuse et vise à réduire les dépôts de peptides amyloïdes dans le cerveau, conformément à l’hypothèse selon laquelle ces dépôts contribuent au déclin cognitif observé dans la maladie d’Alzheimer.
Données d’efficacité et de sécurité
Les essais cliniques disponibles montrent une réduction mesurable des plaques amyloïdes et un ralentissement limité du déclin cognitif chez des patients au stade précoce de la maladie. Des publications rapportent des différences cliniques modestes à 18 mois. Les effets indésirables signalés incluent des réactions liées aux perfusions et des anomalies d’imagerie liées à l’amyloïde (ARIA), notamment des œdèmes cérébraux et des hémorragies intracérébrales, parfois graves.
La HAS a estimé que, au vu des études transmises par les laboratoires, les bénéfices cliniques observés dans le cadre d’un accès précoce étaient insuffisants au regard des risques identifiés.
Cadre réglementaire et comparaisons internationales
La Food and Drug Administration (FDA) aux États-Unis a approuvé le lécanémab en 2023. L’Agence européenne des médicaments (EMA) a délivré une autorisation de mise sur le marché au niveau de l’Union européenne, assortie de restrictions d’usage ciblant notamment les patients porteurs de l’allèle ApoE4, plus à risque d’effets indésirables. Ces autorisations réglementaires ne préjugent pas des décisions de remboursement. Plusieurs pays distinguent l’autorisation de mise sur le marché de la prise en charge par les systèmes de santé ; certains ont autorisé la commercialisation sans engager immédiatement un remboursement systématique.
Le coût du traitement a été relevé comme élevé dans les pays où il est commercialisé, ce qui renforce la nécessité d’évaluations du service médical rendu et d’analyses coût/efficacité par les autorités nationales.
Accès précoce et procédure de droit commun
La procédure d’accès précoce permettrait un remboursement immédiat au prix proposé par le fabricant, sans attendre la procédure de droit commun. La HAS a refusé cette procédure pour Leqembi en estimant que les éléments fournis ne justifiaient pas une prise en charge par la solidarité nationale dans ce cadre. La HAS indique qu’une évaluation selon la procédure de droit commun demeure possible et qu’elle se prononcera ultérieurement sur cette voie, ce qui engagerait des négociations plus longues entre les fabricants et les autorités sanitaires.
Réactions et enjeux pour les acteurs concernés
La décision a suscité des réactions divergentes parmi les professionnels de santé et les associations. La commission de la transparence de la HAS a motivé son avis par le rapport bénéfice/risque tel qu’il ressort des données disponibles. Certains cliniciens et associations soulignent l’intérêt potentiel d’un ralentissement du déclin cognitif en phase précoce, tandis que d’autres experts rappellent la modestie des effets cliniques et le profil de tolérance.
Conclusions et perspectives
La décision de la HAS suspend, pour le moment, le remboursement immédiat du Leqembi en France via la procédure d’accès précoce. Le médicament reste soumis aux évaluations en cours et à d’éventuelles décisions futures dans le cadre de la procédure de droit commun. Des suivis supplémentaires, des études complémentaires et des négociations tarifaires sont évoqués comme étapes possibles avant une éventuelle prise en charge par l’assurance maladie.