Résumé
Une analyse d'études scientifiques, publiée sur le site du ministère de l'Économie et signée par l'économiste Solal Chardon-Boucaud, estime que le temps d'écran excessif et certains usages des réseaux sociaux pourraient réduire la productivité et représenter un coût macroéconomique pour la France. L'étude évalue l'impact actuel et projette un effet plus marqué à horizon 2060 si les expositions actuelles persistent.
Contexte et définition
L'expression « économie de l'attention » désigne le modèle économique de plateformes numériques et de réseaux sociaux conçu pour maximiser le temps d'engagement des utilisateurs afin d'augmenter les revenus publicitaires et la collecte de données. L'analyse rassemble des résultats issus de travaux scientifiques et cherche à chiffrer leurs conséquences socio-économiques.
Principales conclusions économiques
- L'étude estime qu'une combinaison d'effets liés aux usages numériques coûte déjà environ 0,6 point de produit intérieur brut (PIB) à la France.
- Si les niveaux d'exposition observés chez les enfants et adolescents actuels persistent, la perte de productivité pourrait atteindre jusqu'à 2,3 points de PIB par an à l'horizon 2060, selon les projections présentées.
Mécanismes identifiés
L'étude identifie plusieurs mécanismes par lesquels les usages numériques peuvent affecter la santé et la productivité :
- Altération de la qualité du sommeil liée à l'exposition aux écrans ;
- Augmentation de la prévalence de troubles psychologiques (dépression, anxiété, stress chronique) associée à certains usages des réseaux sociaux ;
- Effets dits « directs » de la sollicitation numérique, cités comme liés à la génération d'hormones du stress et à des fonctionnalités des plateformes (par exemple, comparaisons sociales) ;
- Perte de temps productif due aux interruptions fréquentes et à un ralentissement de l'exécution des tâches ;
- Impact potentiel à long terme sur les capacités cognitives (attention, mémorisation, langage) correspondant à une moindre productivité scolaire et professionnelle.
Données et références citées
L'étude s'appuie sur plusieurs sources et résultats publiés :
- Enquête de l'Insee notant des effets néfastes des écrans chez les jeunes : 57 % des moins de 20 ans déclarent ressentir au moins un effet (par exemple une réduction du temps de sommeil) ;
- Enquête du Crédoc indiquant que 30 % des 12-17 ans passent plus de 35 heures par semaine devant un écran ;
- Résultats de l'étude PISA 2022 mentionnés selon lesquels les élèves utilisant un smartphone à l'école plus de 3 heures par jour ont, d'après l'analyse citée, des scores en mathématiques inférieurs de 30 à 50 points par rapport à ceux l'utilisant moins de 2 heures par jour ;
- Mention d'études liant une forte exposition précoce aux écrans à des altérations des capacités d'attention, de mémorisation et des compétences langagières.
Limites et éléments non intégrés
L'étude indique que certains facteurs n'ont pas été intégrés aux projections :
- Les effets potentiels de l'utilisation de l'intelligence artificielle générative, qui, en réduisant l'effort cognitif requis pour certaines tâches, pourrait contribuer à une « dette cognitive » (diminution de l'esprit critique et de la créativité) à long terme, ne sont pas inclus dans les calculs présentés ;
- Les projections reposent sur des synthèses et des hypothèses issues d'études existantes ; les incertitudes méthodologiques et la variabilité des résultats entre études sont des limites à considérer pour l'interprétation des chiffres.
Conclusion
L'analyse estime qu'un temps d'écran excessif et certains usages des plateformes numériques peuvent avoir des effets mesurables sur la santé mentale et les capacités cognitives, avec des conséquences économiques évaluées en points de PIB. Les projections à long terme dépendent des niveaux d'exposition actuels et des hypothèses retenues. L'étude signale par ailleurs des éléments non quantifiés qui pourraient modifier ces estimations.