Introduction
Une étude clinique coordonnée par Romain Barrès et publiée dans la revue Cell Metabolism a évalué l'effet d'une alimentation ultra-transformée sur des mesures de fertilité et des paramètres métaboliques chez des hommes en bonne santé. Les auteurs situent leur travail dans le contexte d'une augmentation mondiale de la consommation d'aliments ultra-transformés et de travaux épidémiologiques ayant signalé des corrélations entre cette consommation et plusieurs maladies chroniques.
Méthodes
L'étude a inclus 43 hommes âgés de 20 à 35 ans. Les participants ont été exposés, en alternance, à deux régimes alimentaires pendant trois semaines chacun, avec une période d'intervalle de trois mois entre les régimes. L'un des régimes était riche en aliments ultra-transformés et l'autre reposait sur des aliments peu ou non transformés. Un sous-groupe a reçu les deux régimes avec un apport calorique contrôlé et adapté à l'âge, au poids et au niveau d'activité physique ; l'autre sous-groupe a suivi les deux régimes avec un excès de 500 kcal par jour.
Des prélèvements sanguins, des analyses de sperme et des mesures anthropométriques et biologiques (poids, masse grasse, cholestérol, etc.) ont été réalisés de façon régulière.
Résultats
Hormones et paramètres du sperme
La consommation du régime ultra-transformé a été associée, chez la majorité des participants, à une diminution des concentrations de la FSH (hormone stimulant la spermatogenèse) et de la testostérone, ainsi qu'à une réduction du nombre de spermatozoïdes mobiles.
Poids et composition corporelle
En trois semaines, la consommation d'aliments ultra-transformés comparée à des aliments peu ou non transformés a entraîné une prise de poids moyenne de 1,4 kg dans le groupe à apport calorique adapté et de 1,3 kg dans le groupe en excès calorique. Cette prise de poids était principalement attribuée à une augmentation de la masse grasse. Les participants ayant réduit le niveau de transformation de leur alimentation ont présenté une perte de poids.
Interprétation et hypothèses
Les auteurs suggèrent que des substances présentes dans certains aliments ultra-transformés, éventuellement classées parmi les perturbateurs endocriniens, pourraient contribuer aux modifications observées des paramètres hormonaux et du sperme. L'étude distingue les effets liés au degré de transformation des aliments de ceux liés à l'excès calorique, en observant des altérations même lorsque l'apport énergétique était contrôlé.
Limites
Les chercheurs mentionnent plusieurs limites au protocole : les participants n'étaient pas hospitalisés pendant les périodes d'intervention, ce qui a conduit à s'appuyer en partie sur leurs déclarations pour l'apport énergétique ; la durée de chaque période de régime (trois semaines) est courte et peut avoir généré des réponses aiguës susceptibles d'évoluer différemment sur le long terme.
Contexte scientifique
Avant cette étude, seuls quelques essais cliniques comparables avaient été réalisés, montrant que des régimes riches en aliments ultra-transformés pouvaient favoriser une surconsommation calorique par rapport à des régimes peu transformés. Des études épidémiologiques ont également associé la consommation d'aliments ultra-transformés à un risque accru de maladies chroniques, sans toutefois établir de relation de causalité dans ces travaux observationnels.
Conclusion
Chez des hommes en bonne santé et sur le court terme, ce travail rapporte des modifications hormonales, des altérations de paramètres du sperme et une augmentation de la masse grasse associées à un régime riche en aliments ultra-transformés, y compris lorsque l'apport calorique est contrôlé. Les auteurs soulignent la nécessité d'études complémentaires pour préciser les mécanismes en jeu et l'évolution de ces effets sur des durées plus longues.