Contexte et ouverture des débats
L'Assemblée nationale a entamé l'examen de la partie "recettes" du projet de loi de finances pour 2026 lors d'une séance ouverte par le Premier ministre. Les discussions, tenues notamment les 24 et 25 octobre 2025, interviennent dans un hémicycle sans majorité stable et doivent conduire à un vote solennel prévu le 4 novembre 2025 avant transmission du texte au Sénat.
Calendrier institutionnel et contraintes financières
La commission des Finances avait rejeté la partie recettes en première lecture, entraînant des débats intensifs en séance. Les débats se déroulent dans un contexte macroéconomique marqué par des révisions de notes souveraines : plusieurs agences de notation ont ajusté leurs évaluations et perspectives, ce qui renforce les enjeux de crédibilité budgétaire avancés par le gouvernement.
Mesures adoptées en première lecture à l'Assemblée
Plusieurs amendements ont été adoptés lors de l'examen de la partie recettes, parfois contre l'avis du gouvernement. Les principaux points votés comprennent :
Barème de l'impôt sur le revenu : les députés ont rejeté le gel proposé par l'exécutif et approuvé un amendement réindexant le barème sur l'inflation (évaluée dans les débats à 1,1 %). Le gouvernement estimait que le maintien du gel aurait rapporté environ 2 milliards d'euros et entraîné l'entrée de quelque 200 000 foyers dans l'assiette de l'impôt sur le revenu.
Heures supplémentaires : l'Assemblée a voté la défiscalisation totale des heures supplémentaires en supprimant le plafond existant (7 500 euros). La mesure a été chiffrée par le gouvernement à environ 1 milliard d'euros.
Pensions alimentaires et prestations compensatoires : un amendement a inversé le régime fiscal des pensions alimentaires en défiscalisant les sommes perçues par les bénéficiaires et en soumettant fiscalement les personnes qui les versent, avec un plafonnement fixé à 4 000 euros par enfant et 12 000 euros par foyer. L'exposé des motifs mentionnait un impact budgétaire estimé à environ 450 millions d'euros par an. Des dispositions rendant non imposables certaines prestations compensatoires ont également été adoptées.
Contribution sur les hauts revenus : la contribution différentielle sur les revenus élevés (dispositif instauré antérieurement) a été prolongée jusqu'au retour du déficit public en dessous de 3 % du PIB ; cette mesure a été chiffrée à environ 1,5 milliard d'euros pour 2026.
Abattement des journalistes : le plafond ouvrant droit à l'abattement spécifique des journalistes a été abaissé, passant de 93 510 euros à 75 676 euros de revenus annuels (soit 3,5 SMIC), restreignant ainsi le champ des bénéficiaires.
Crédit d'impôt Ehpad : les députés ont adopté la transformation d'une réduction d'impôt sur les frais d'hébergement en établissement pour personnes âgées dépendantes en un crédit d'impôt, afin d'étendre le bénéfice aux ménages non imposables.
Mesures discutées et points de désaccord
Plusieurs sujets ont cristallisé les oppositions :
Taxe dite "Zucman" : la gauche a porté différentes versions d'un impôt minimum sur les très hauts patrimoines. Le Parti socialiste a proposé une version dite "allégée" consistant en un impôt minimum autour de 3 % à partir de patrimoines de 10 millions d'euros, excluant les entreprises familiales et certaines entreprises innovantes. Cette proposition se distingue de la version initiale défendue par l'économiste visé par le terme (impôt plancher de 2 % sur les patrimoines supérieurs à 100 millions d'euros). Le dispositif fait l'objet d'un vif débat entre groupes politiques et n'avait pas été adopté en commission.
Suspension ou maintien de la réforme des retraites : certains groupes ont demandé la suspension de la réforme adoptée en 2023. Le président du Sénat a prévenu que la chambre haute, où la droite et les centristes sont majoritaires, pourrait rétablir la réforme lors de l'examen du budget de la Sécurité sociale.
Alignements politiques et conséquences pour le gouvernement
Les votes en séance ont révélé des coalitions ponctuelles et transversales entre députés de la droite, de l'extrême droite, d'une partie des macronistes, et de groupes de gauche sur des sujets précis. Ces alliances ont conduit à des défaites ponctuelles pour l'exécutif sur des éléments du volet recettes. En réaction, la majorité relative du Sénat et les pressions intergroupes font peser une incertitude sur la version finale du budget, qui sera renégociée au cours de la navette parlementaire.
Prochaines étapes
Après le vote solennel de la première partie des recettes, le texte sera transmis au Sénat pour examen. Les débats sur la partie dépenses et le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), incluant la question de la réforme des retraites et de sa suspension éventuelle, doivent se poursuivre en commission et en séance. Les arbitrages budgétaires devront concilier objectifs de réduction du déficit et demandes de modifications portées par des groupes exigeant des mesures qualifiées de justice fiscale.
Données chiffrées mentionnées dans les débats
- Recette estimée liée au gel du barème de l'impôt sur le revenu : ~2 milliards d'euros.
- Coût estimé de la défiscalisation intégrale des heures supplémentaires : ~1 milliard d'euros.
- Impact estimé de la défiscalisation des pensions alimentaires : ~450 millions d'euros par an.
- Coût estimé de la revalorisation limitée de la première tranche du barème : ~700 millions d'euros (chiffre cité en débat).
- Produit attendu de la prolongation de la contribution différente sur les hauts revenus : ~1,5 milliard d'euros en 2026 selon le gouvernement.
Aucun élément de calendrier définitif sur l'ensemble des amendements n'était fixé à l'issue de la séance ; la version finale du budget dépendra des votes successifs en première lecture, au Sénat et, le cas échéant, d'éventuels accords interparlementaires.








