Contexte
Le projet de loi de finances pour 2026 a été examiné à l'Assemblée nationale en octobre 2025, d'abord en commission des Finances puis en séance plénière. Le débat a porté sur des modifications à la fois des recettes (nouveaux impôts et prolongation de contributions exceptionnelles) et des dépenses (gel ou révision de prestations, coupes sectorielles). Plusieurs centaines d'amendements ont été déposés et une partie d'entre eux adoptée en commission.
Mesures annoncées par le gouvernement
Gel ou révision des prestations sociales : le projet prévoit de suspendre la revalorisation habituelle de certaines prestations (dont le RSA et certaines allocations familiales) et de revoir les modalités d'augmentation des allocations familiales pour le deuxième enfant (report de l'âge d'augmentation de 14 à 18 ans selon le projet).
Participation financière des patients : le projet inclut un renforcement de la participation des patients sur certaines consultations et médicaments, avec un doublement évoqué pour certaines participations.
Mesures fiscales générales : fin de certaines exonérations et réductions (frais de scolarité, exonération de cotisations pour apprentis), hausse d'assiettes fiscales (prélèvement de 8 % sur certains avantages en nature comme les titres-restaurant et chèques-vacances), et création ou adaptation de dispositifs visant les hauts revenus et les grandes entreprises.
Contributions et surtaxes : prolongation de la contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR) et de la contribution exceptionnelle sur les grandes entreprises (CEHR) instaurées en 2025. Des taux et seuils spécifiques ont été proposés pour ces dispositifs.
Dispositions contre l'évasion et l'optimisation fiscale : diverses propositions ont été déposées, parmi lesquelles le retour d'une « exit tax » inspirée de la version de 2019, une contribution sur certains expatriés à hauts revenus et des taxes visant les holdings patrimoniales (avec modalités discutées en commission, y compris une taxation au moment du décès dans la version retenue en commission).
Amendements adoptés en commission et effets budgétaires
Volume d'amendements et chiffrage : environ 1 521 amendements ont été déposés. Une première évaluation a estimé l'impact des modifications adoptées en commission à près de 9 milliards d'euros ; ce chiffrage a été révisé en soirée autour de 6 milliards d'euros après l'adoption de nouvelles recettes et taxes.
Fiscalité et recettes nouvelles adoptées ou discutées : création ou prolongation de surtaxes sur les hauts revenus et grandes entreprises, mesures visant les holdings et les expatriés à hauts revenus, et rétablissement ou adaptation de dispositifs de lutte contre l'évasion fiscale. Une taxe sur la détention de holdings patrimoniales a été proposée puis modifiée pour n'être due qu'au moment du décès du titulaire.
Énergie : la commission a adopté un amendement porté par La France insoumise et soutenu par le Rassemblement national remettant en cause la réforme de tarification prévue pour 2026. L'amendement propose notamment de plafonner les marges des producteurs et de revoir la méthode de calcul des tarifs réglementés pour les fonder sur les coûts de production.
Immobilier : un amendement adopté prévoit d'instaurer une taxation des plus-values lors de la vente d'un bien désigné comme résidence principale, avec une condition d'exonération de durée minimale de résidence de cinq ans et des dérogations pour l'achat d'une nouvelle résidence principale ou pour motifs impérieux.
Impacts sectoriels signalés
Associations et lutte contre la pauvreté : une quarantaine d'associations ont exprimé leur opposition au projet, estimant que certaines mesures risquent d'accroître la précarité. Des exemples rapportés lors de distributions alimentaires décrivent des personnes vivant avec des prestations mensuelles modestes (ex : bénéficiaire combinant RSA et autres allocations pour environ 875 euros par mois, locataire avec un loyer de 560 euros) et des personnes handicapées évoquant des restes à charge pour soins (ex : allocation adulte handicapé de 1 033 euros mensuels et dépenses annuelles d'environ 500 euros pour des soins).
Insertion par l'activité économique (IAE) : le projet prévoit une réduction des financements de l'IAE de l'ordre de 14 % (soit environ 200 millions d'euros), selon des acteurs locaux. Le Collectif des acteurs de l'IAE du bassin d'Alençon a communiqué une estimation d'emplois et d'accompagnements potentiellement affectés (chiffres cités : 20 000 postes supprimés et 60 000 personnes en moins accompagnées).
Économie sociale et solidaire (ESS) : les acteurs de l'ESS demandent des mesures compensatoires après l'annonce de la suppression programmée de la CVAE pour les structures lucratives, appelant à un geste sur la taxe sur les salaires. Le secteur, qui regroupe environ 2,5 millions de salariés et plus de 200 000 structures, signale des réductions de crédits publics sur des dispositifs sectoriels (chiffres mentionnés : 160 millions d'euros en moins pour l'IAE, 75 millions pour les entreprises adaptées, près de 51 millions pour la promotion du sport).
Chambres de Commerce et d'Industrie (CCI) : le projet comporte une diminution de la taxe affectée aux CCI estimée à 175 millions d'euros, soit une baisse d'environ un tiers des recettes affectées au réseau des CCI selon leurs représentants.
Positions politiques et propositions alternatives
Groupes d'opposition et contre-propositions : La France insoumise a présenté un contre-budget proposant des dépenses supplémentaires financées par des recettes nouvelles (parmi lesquelles la réintroduction de taxes sur les plus fortunés, dont une proposition proche d'une « taxe Zucman », et la restauration d'un impôt sur la fortune). Les représentants de LFI ont chiffré leurs propositions en dizaines de milliards d'euros.
Répartition de l'effort : économistes, associations et représentants d'employeurs ont discuté de l'équité de l'effort demandé par le budget, certains estimant que le poids des économies et des hausses de participation pèserait davantage sur les ménages modestes.
Calendrier et suite du processus législatif
- Après l'examen en commission, le projet de loi de finances a été débattu en séance plénière à l'Assemblée. Les dispositions adoptées en commission peuvent être modifiées en séance publique et lors des navettes entre l'Assemblée et le Sénat. L'issue finale dépendra des votes successifs et des arbitrages gouvernementaux.
Conséquences attendues
- Les mesures budgétaires et les amendements adoptés convergent vers une recomposition à la fois des recettes et des dépenses publiques, avec des conséquences différenciées selon les secteurs : administrations locales, associations, structures de l'ESS, CCI et ménages à faibles revenus. Les impacts signalés comprennent des réductions de services, des pertes d'accompagnement pour des publics en insertion et des ajustements de charges et de contributions pour les entreprises et les salariés.








