Introduction
Des données scientifiques indiquent que la maltraitance infantile est associée à des risques accrus de maladies chroniques, de troubles psychologiques et de décès prématuré chez les personnes concernées. Au-delà des conséquences physiques et psychologiques, des recherches récentes montrent que la maltraitance peut également induire des modifications biologiques profondes, incluant le vieillissement cellulaire prématuré.
Contexte scientifique
Plusieurs études ont suggéré que les expériences traumatiques précoces, telles que la maltraitance, sont susceptibles de provoquer des changements moléculaires ayant un impact durable sur la biologie des enfants. Toutefois, la compréhension des mécanismes sous-jacents restait incomplète, en particulier chez les enfants d’âge préscolaire, en raison de la complexité des processus biologiques et du manque d’outils adaptés pour mesurer les conséquences de la maltraitance à la fois sur le plan biologique et comportemental.
Étude menée par l’université de Fukui
Pour approfondir ces connaissances, une équipe de l’université de Fukui au Japon a mené une étude publiée dans la revue scientifique PLOS One. Les chercheurs ont examiné le vieillissement biologique et les interactions sociales chez 96 enfants âgés de 4 à 5 ans, dont 36 ayant subi de graves formes de maltraitance comparés à 60 enfants sans antécédents de maltraitance.
Le vieillissement biologique a été évalué par l’analyse des profils de méthylation de l’ADN, une technique permettant d’étudier les marques épigénétiques qui influencent l’expression des gènes sans modifier l’ADN lui-même. Les échantillons ont été recueillis par prélèvements buccaux. Parallèlement, l’attention sociale des enfants a été mesurée à l’aide d’une technologie d’oculométrie, qui permet d’analyser le temps consacré à regarder certaines parties de séquences vidéo, notamment les yeux dans des visages humains.
Résultats principaux
L’étude a révélé que les enfants ayant subi des maltraitances présentaient des signes de vieillissement biologique accéléré par rapport au groupe témoin. Ils passaient également moins de temps à porter leur attention sur les yeux dans les vidéos, un paramètre associé à la reconnaissance et la compréhension sociales. L’accélération du vieillissement cellulaire, ainsi que la réduction du contact visuel avec les yeux, étaient toutes deux corrélées à des scores plus élevés en difficultés émotionnelles et comportementales, mesurés par des questionnaires spécialisés.
Interprétation et implications
Les résultats suggèrent que la maltraitance infantile peut avoir des impacts mesurables sur le développement biologique et social des enfants, laissant des traces durables et objectivables. Les chercheurs soulignent l’importance d’une détection et d’une prise en charge précoces pour atténuer les effets à long terme sur la santé et le développement de l’enfant.
Références
- Ochiai K, Nishitani S, Yao A, Hiraoka D, Kawata NY, Suzuki S, et al. (2025) Behavioral and emotional difficulties in maltreated children: Associations with epigenetic clock changes and visual attention to social cues. PLoS One 20(5): e0321952. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0321952