Introduction
La forêt des Pyrénées est confrontée à une dégradation progressive liée à une combinaison de facteurs environnementaux et biologiques. Ce phénomène interpelle les professionnels du secteur forestier et les autorités compétentes sur la nécessité de mettre en place des stratégies de gestion et de sauvegarde adaptées.
Symptômes du dépérissement forestier
Dans le massif du Mourtis, à une altitude de 1 350 mètres, les forêts de sapins et de hêtres montrent des signes de dépérissement. Les projections établies à partir des prévisions climatiques du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) et de l'Office national des forêts (ONF) indiquent que, dans environ cinquante ans, ces essences ne pourront plus subsister en dessous de 1 800 mètres d'altitude.
Dans certaines zones, telles que la forêt des Arguts à Boutx (Haute-Garonne), la présence d'arbres morts et de feuillages desséchés est observée. Sur certaines pentes, des sapins morts aux branches décolorées sont visibles parmi la végétation persistante.
Facteurs en cause
Réchauffement climatique et sécheresses
Depuis le début des années 2000, des épisodes de sécheresse et de canicule se multiplient même à ces altitudes, causant un stress hydrique inexistant par le passé pour ces arbres. Cette évolution climatique fragilise l’écosystème et ses principaux occupants.
Prolifération des parasites
L’augmentation des températures a favorisé la multiplication du scolyte, un insecte coléoptère parasite. Celui-ci creuse des galeries dans les troncs et bloque la circulation de la sève, provoquant la mort rapide de groupes d’arbres. Dans certains cas, des parcelles entières d’épicéas ont dû être abattues sur de courtes périodes afin de valoriser le bois restant.
Surpopulation de cerfs
La régénération naturelle de la forêt est également entravée par l’augmentation des populations de cerfs, réintroduites en 1958 et devenues incontrôlées. Ces animaux consomment une grande quantité de végétation, incluant les pousses et bourgeons des jeunes arbres, compromettant ainsi leur renouvellement.
Enjeux et perspectives
Selon Jean-Lou Meunier, directeur de l’ONF Pyrénées-Gascogne, une surface de 25 000 hectares en Haute-Garonne et dans les Hautes-Pyrénées est menacée par cette accumulation de facteurs. Plusieurs responsables du secteur considèrent que la forêt pyrénéenne approche d’un seuil difficilement réversible si des actions efficaces ne sont pas mises en œuvre dans un délai court.
Actions envisagées
Plusieurs mesures sont à l'étude et en cours de déploiement :
- Maîtrise des populations de cerfs par la chasse.
- Protection physique des jeunes plants grâce à des enclos installés sur place.
- Introduction et dispersion d’essences végétales plus adaptées aux nouvelles conditions climatiques. Parmi celles-ci figurent le cèdre de l’Atlas (originaire d’Afrique du Nord), le noisetier de Byzance, le mélèze d’Europe, le chêne pubescent ou encore le pin de Salzman.
- Gestion de la diversité forestière pour renforcer la résilience du massif sous la forme d’une «mosaïque» d’essences.
Les expérimentations dans le département voisin de l’Aude ont montré une adaptation du cèdre de l’Atlas face à la sécheresse. L’objectif affiché est d’accompagner la migration naturelle de certaines essences, avec une majorité du renouvellement attendu de façon spontanée.
Situation dans d’autres massifs
Les préoccupations ne se limitent pas aux Pyrénées. Des régions comme les Vosges et le Jura subissent également un dépérissement important des massifs forestiers. Entre 2018 et 2023, les volumes de bois mort récolté dans les forêts publiques jurassiennes sont passés de 20 000 à 320 000 mètres cubes.
Conclusion
La préservation de la forêt pyrénéenne nécessite la coordination de plusieurs mesures visant à atténuer l’impact du changement climatique, des espèces invasives et des parasites. Les forestiers et autorités locales travaillent à adapter la gestion forestière pour maintenir les fonctions écologiques et économiques du massif à long terme.