Contexte
En 2017, les autorités estoniennes ont instauré une interdiction générale de fumer dans les établissements pénitentiaires. Cette mesure visait à protéger la santé et à limiter le tabagisme passif parmi les détenus et le personnel.
Procédure et requêtes
Trois personnes détenues ont saisi la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), invoquant une atteinte à leur droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. Elles ont signalé des symptômes attribués au sevrage tabagique, notamment prise de poids, troubles du sommeil, dépression et anxiété.
Décision de la CEDH
Le 4 novembre 2025, la CEDH, siégeant à Strasbourg, a jugé qu’il y avait eu violation de l’article 8 de la Convention. La décision a été adoptée par quatre voix contre trois. La Cour a condamné l’État estonien à verser 1 500 euros à chacun des trois requérants au titre des frais de justice.
Motifs de la décision
La Cour a considéré que les autorités estoniennes avaient imposé l’interdiction sans procéder à une évaluation suffisante de son importance et de son impact sur l’autonomie personnelle des détenus fumeurs. Elle a jugé que les justifications avancées par l’État n’étaient ni pertinentes ni suffisantes pour démontrer que la restriction était proportionnée.
La CEDH a rappelé que le fait d’être privé de liberté ne supprime pas les droits garantis par la Convention et que, dans un contexte d’autonomie personnelle déjà limitée, la marge d’appréciation des États est réduite. En conséquence, des exigences procédurales et justificatives plus strictes s’imposent lorsque l’on restreint des décisions relevant de l’autonomie personnelle des détenus.
Portée et jurisprudence
La Cour avait précédemment traité des questions liées au tabagisme en milieu pénitentiaire, notamment le tabagisme passif. La présente décision est la première, selon la CEDH, à évaluer spécifiquement l’impact d’une interdiction totale de fumer pour des détenus anciens fumeurs.
La décision précise les conditions procédurales et justificatives que doivent respecter les États lorsqu’ils restreignent le comportement personnel des personnes détenues au regard de l’article 8 de la Convention, et elle pourrait influencer les politiques pénitentiaires dans les États partie à la Convention.








