Contexte
Certaines formes de troubles chroniques digestifs, regroupés sous l'appellation "troubles de l'interaction intestin-cerveau" (DGBI), peuvent apparaître après un épisode d'infection digestive aiguë, le plus souvent une gastro-entérite. L'identification d'une origine post-infectieuse est parfois difficile en raison de l'oubli d'un épisode infectieux antérieur ou de l'absence de rapprochement entre événements.
Définitions
Les DGBI comprennent notamment le syndrome de l'intestin irritable, la dyspepsie fonctionnelle, la douleur abdominale fonctionnelle, le ballonnement, la diarrhée fonctionnelle et la constipation fonctionnelle. Ces troubles se caractérisent par des symptômes digestifs chroniques en l'absence de lésion organique identifiable et résultent d'une perturbation de la communication entre le système nerveux entérique et le système nerveux central, dite axe intestin-cerveau. Cette perturbation s'accompagne fréquemment d'une hypersensibilité viscérale et peut être associée à des symptômes anxieux ou dépressifs.
Définition des DGBI post-infectieux
Un DGBI post-infectieux est défini comme l'apparition des symptômes après une gastro-entérite aiguë, confirmée par un examen des selles ou par la présence d'au moins deux des trois symptômes suivants au moment de l'infection aiguë : fièvre, diarrhée ou vomissements.
Étude et principaux résultats
Une analyse basée sur la Rome Foundation Global Epidemiology Study a cherché à estimer la proportion de DGBI d'origine post-infectieuse. Les données proviennent de 26 pays et portent sur 21 713 participants présentant au moins un DGBI. L'analyse a montré que 10,5 % des participants remplissaient les critères d'un trouble post-infectieux. Ces résultats ont été présentés lors d'une session du congrès européen de gastro-entérologie (UEG Week, Berlin, octobre 2025).
Répartition géographique et caractéristiques démographiques
La proportion de DGBI post-infectieux varie selon les régions : environ 7,1 % en Asie, 6,4 % en Amérique latine et 2,4 % en Australie. Les différences régionales peuvent refléter des variations d'exposition aux agents infectieux, des facteurs environnementaux, socio-économiques ou des facteurs génétiques.
Sur le plan démographique, la part d'hommes était plus élevée parmi les cas post-infectieux (46,8 %) que parmi les autres cas de DGBI (40,9 %). Les patients avec un DGBI post-infectieux étaient plus jeunes : plus de 60 % d'entre eux avaient moins de 40 ans, contre 46,1 % dans le groupe des DGBI non post-infectieux. Par ailleurs, 3,4 % des patients avec un DGBI post-infectieux vivaient en milieu rural ou étaient en contact avec des animaux d'élevage, contre 1,8 % dans le groupe non post-infectieux.
Comorbidités psycho-émotionnelles
Les participants présentant un DGBI post-infectieux présentaient des taux plus élevés de symptômes anxieux et dépressifs que les autres patients atteints de DGBI : taux d'anxiété signalé de 40 % contre 27,5 %, et symptômes dépressifs signalés de 37,9 % contre 26,5 %.
Implications pour la prise en charge
L'identification d'un antécédent infectieux peut fournir une explication à l'apparition de symptômes digestifs chroniques en l'absence de lésion organique. La prise en charge clinique des DGBI ne différencie pas nécessairement l'origine post-infectieuse de l'origine non infectieuse, mais l'approche de soin doit inclure l'évaluation des symptômes somatiques et psycho-émotionnels. Les mesures thérapeutiques mentionnées dans les pratiques cliniques comprennent la prise en charge symptomatique (médicaments, probiotiques, modifications alimentaires) et la prise en charge psychologique lorsque les symptômes anxieux ou dépressifs sont présents.