Introduction
Un mouvement de protestation déclenché contre les coupures d’eau et d’électricité s’est transformé en crise politique majeure. À partir du 11 octobre, des éléments du Corps d’Armée des Personnels et des Services Administratifs et Techniques (CAPSAT) se sont ralliés aux manifestants, aboutissant à une contestation ouverte de l’exécutif, à des décisions institutionnelles contradictoires et à une prise de pouvoir revendiquée par des militaires. Un bilan humain élevé et des perturbations internationales ont accompagné ces événements, tandis que des instances régionales et internationales ont appelé au respect de l’ordre constitutionnel et des droits fondamentaux.
Chronologie détaillée des événements
Le 25 septembre 2025: Début des manifestations contre les coupures d’eau et d’électricité. Le mouvement s’étend rapidement à plusieurs villes et prend une tournure politique, avec des heurts entre manifestants et forces de l’ordre.
Le 3 octobre 2025: Le chef de l’État qualifie la mobilisation de tentative de « coup d’État », évoque des manipulations et une « cyberattaque », limoge le gouvernement et entame des consultations pour un nouveau Premier ministre. Des grèves sont annoncées dans des secteurs stratégiques. Un premier bilan du Haut-Commissariat aux droits de l’homme fait état d’au moins 22 morts et de centaines de blessés, contesté par l’exécutif.
Le 11 octobre 2025: Des soldats du CAPSAT rejoignent des cortèges à Antananarivo, appellent à ne pas tirer sur la foule et entrent en ville à bord de véhicules militaires. Des affrontements ont lieu devant une caserne avec des éléments de la gendarmerie.
Le 12 octobre 2025: Des officiers du CAPSAT déclarent publiquement que les ordres des forces armées émaneront de leur quartier général et annoncent la nomination du général Démosthène Pikulas comme chef d’état-major. La présidence dénonce une tentative de prise de pouvoir illégale. Le Sénat annonce la destitution de son président, Richard Ravalomanana. Côté transport, Air France suspend ses vols Paris–Antananarivo jusqu’au 13 octobre inclus et Air Austral annule au moins une rotation ; des avis consulaires déconseillent les déplacements non essentiels.
Le 13 octobre 2025: Rassemblements importants sur la place du 13‑Mai et devant l’hôtel de ville, avec des militaires visibles aux côtés des manifestants. L’allocution présidentielle à la télévision est reportée à plusieurs reprises en raison de la présence de soldats au siège de la TV publique ; le chef de l’État s’exprime finalement sur les réseaux sociaux, dit se trouver dans un « lieu sûr » après une « tentative de meurtre » et appelle au respect de la Constitution.
Le 14 octobre 2025: Le président publie un décret de dissolution de l’Assemblée nationale. Lors d’une session extraordinaire, une majorité de députés vote la destitution du chef de l’État. Une unité militaire ralliée à la contestation annonce « prendre le pouvoir », dissout le Sénat et la Haute Cour constitutionnelle (HCC) et suspend la Constitution. La HCC publie un communiqué constatant une vacance de la présidence et invite l’autorité compétente à exercer les fonctions de chef de l’État.
Le 15 octobre 2025: Un acte de la HCC constate la vacance de la présidence et du Sénat et invite une autorité militaire à assurer provisoirement les fonctions de chef de l’État. Des responsables du CAPSAT confirment la dissolution ou suspension de plusieurs institutions, tout en indiquant le maintien de l’activité de l’Assemblée nationale. L’annonce d’un comité de transition et d’un calendrier électoral de 18 à 24 mois est évoquée.
Le 16 octobre 2025: Le colonel Michaël Randrianirina affirme que la HCC l’a invité à exercer les fonctions de chef de l’État et réfute l’idée d’un coup d’État, parlant de « prise de responsabilité ». Il annonce un comité d’officiers et un calendrier de transition de 18–24 mois, estimant irréaliste un délai de 60 jours. L’Assemblée nationale a voté la destitution du président. L’Union africaine suspend Madagascar et appelle au rétablissement de l’ordre constitutionnel. Selon un communiqué de l’entourage, le chef de l’État a quitté le pays entre les 11 et 12 octobre, après s’être dit en « lieu sûr ».
Évolutions et corrections entre articles
14 octobre: annonce simultanée d’un décret présidentiel de dissolution de l’Assemblée nationale, d’un vote de destitution par les députés et d’une prise de pouvoir militaire avec suspension de la Constitution et dissolution du Sénat et de la HCC.
15 octobre: la HCC formalise la vacance de la présidence (et du Sénat) et invite une autorité militaire à assurer provisoirement les fonctions de chef de l’État. Les militaires indiquent désormais maintenir l’activité de l’Assemblée nationale, corrigeant de facto la portée des annonces initiales de dissolution généralisée.
12 → 16 octobre: la séquence de leadership militaire évolue. Le 12 octobre, le CAPSAT annonce la nomination du général Démosthène Pikulas comme chef d’état-major ; le 16 octobre, le colonel Michaël Randrianirina s’impose comme figure de la transition et déclare avoir été invité par la HCC à exercer les fonctions de chef de l’État.
13 → 16 octobre: la situation personnelle du président évolue dans la communication publique. Le 13 octobre, il s’exprime depuis un « lieu sûr » après une « tentative de meurtre » ; le 16 octobre, un communiqué de son entourage indique qu’il a quitté le pays entre les 11 et 12 octobre en raison de menaces graves.
Concordances
- Déclenchement des manifestations le 25 septembre par des revendications liées aux services publics (eau, électricité), rapidement élargies à des demandes politiques.
- Ralliement d’éléments du CAPSAT à partir du 11 octobre, appels à ne pas tirer sur les manifestants et présence de soldats aux côtés des cortèges.
- Bilan humain initial élevé: au moins 22 morts et plus d’une centaine de blessés rapportés par des instances onusiennes, avec contestation des chiffres par l’exécutif.
- Réactions internationales appelant au respect de l’ordre constitutionnel et à la retenue, suspension du pays par l’Union africaine.
- Perturbations des liaisons aériennes autour du 11–13 octobre, dont la suspension temporaire des vols d’Air France vers Antananarivo.
Divergences
- Qualification des événements: les autorités de l’exécutif dénoncent une tentative de coup d’État, tandis que des responsables militaires parlent de « prise de responsabilité ».
- Continuité institutionnelle: annonces de dissolution du Sénat et de la HCC, puis indication d’un maintien de l’Assemblée nationale ; positions réajustées après intervention de la HCC.
- Statut et localisation du chef de l’État: messages initiaux depuis un « lieu sûr » et contestation des rumeurs de départ, puis communication ultérieure évoquant un départ du pays entre les 11 et 12 octobre.
- Calendrier de transition: horizon de 18–24 mois annoncé par les militaires, en contradiction avec une option de 60 jours évoquée par d’autres acteurs.
- Bilan humain: chiffres onusiens (au moins 22 morts, plus d’une centaine de blessés) contestés par l’exécutif.
Implications potentielles
- Gouvernance et légitimité: la coexistence de décisions contradictoires (dissolution de l’Assemblée, vote de destitution, vacance déclarée par la HCC, prise de pouvoir militaire) crée une incertitude sur la chaîne de commandement et la validité des actes.
- Transition politique: un calendrier de 18–24 mois impliquerait une refonte institutionnelle prolongée, avec des risques de contentieux constitutionnels et de tensions avec les partenaires régionaux et internationaux.
- Droits humains et sécurité: le bilan humain et les heurts signalent un risque persistant de violences ; des garanties de protection des civils et de reddition de comptes seront déterminantes.
- Économie et services: grèves, perturbations logistiques et suspension temporaire de vols suggèrent des impacts sur l’activité économique et l’accès aux services essentiels.
Conclusion
Entre fin septembre et la mi-octobre, Madagascar a connu une escalade rapide d’un mouvement social en crise institutionnelle, marquée par le ralliement d’éléments militaires, des décisions politiques et juridiques concurrentes, et une intervention de la HCC établissant la vacance de la présidence. La prise de pouvoir revendiquée par des officiers du CAPSAT et l’annonce d’une transition de 18–24 mois ont suscité des réactions internationales, dont la suspension du pays par l’Union africaine. La clarification de l’autorité exécutive, la définition d’un calendrier de transition conforme aux normes régionales et la protection des droits fondamentaux demeurent les enjeux centraux à court terme.

















